Consommation de stéroïdes, comportements obsessifs ou enrôlement hâtif. Accusé de tous les maux, le culturisme fait peau neuve, une dose de transparence à la fois.
Victime de préjugés, le culturisme cherche à remettre les pendules à l’heure avec l’instauration de politiques d’encadrement. Malgré ces ajouts, l’image du culturisme peine à faire le poids.
Processus continu, le culturisme est un sport musclé où le physique détermine les meilleurs. «Le culturisme est le seul sport où l’énergie de l’athlète est demandée 24 heures sur 24, avance le codirecteur général de l’Association des physiques du Québec (APQ), Benoît Brodeur. Tout est calculé en permanence: les composantes de notre alimentation, les temps d’entraînement et les heures de sommeil.»
Participant de la Coupe Prestige et culturiste dès ses 18 ans, Steeven Bourdon consommait à peine 250 millilitres de liquides au quotidien quatre jours avant de compétitionner. «Ma patience diminuait au rythme où ma fatigue augmentait durant les quelques mois avant la compétition», soutient-il. Au début de sa carrière junior, mal informé, il a adopté un rythme de vie malsain. «C’est typique des recrues, analyse le jeune homme de 24 ans. Nous consultons des livres et des magazines avec des procédés inadéquats pour notre corps.» Ce n’est qu’une fois dans le milieu que les nouveaux sont pris en charge. «Je n’ai reçu l’aide d’un entraîneur et d’une nutritionniste qu’une fois membre des organisations de culturisme», reconnaît Steeven Bourdon.
Si la prise de compléments alimentaires est encouragée dans le milieu du culturisme, les stéroïdes sont bannis des compétitions. Depuis 2004, la Canadian Body Building Federation s’est dotée d’une politique antidopage appliquée par tous les groupes canadiens de culturisme, dont l’APQ. «Cette mesure a été prise pour atteindre les critères antidopage requis par les compétitions nationales et internationales, mais également dans un souci de transparence», indique le codirecteur de l’APQ, Benoît Brodeur. Les contrevenants peuvent se voir retirer leur admissibilité aux compétitions de culturisme pendant deux ans pour la première infraction. Cette suspension temporaire peut devenir permanente à la prochaine offense. Depuis quatre ans, aucun cas de dopage n’a été recensé par l’APQ selon Benoît Brodeur.
Alors que le détracteurs du culturisme considèrent le sport dangereux pour la croissance, Benoît Brodeur soutient que c’est tout le contraire. «Le culturisme n’inhibe pas la croissance, ça l’active», s’insurge-t-il. La responsable des communications de l’Association québécoise des médecins du sport (AQMS), Alexandra Bwenge, rappelle toutefois que la période de perte de gras provoque des manques en eau, en vitamines et minéraux, des éléments essentiels au développement et au maintien d’un corps en santé. À quelques jours d’une compétition, la déshydratation permet aux culturistes de définir à la perfection biceps, mollets et petit rhomboïde. L’AQMS précice qu’elle n’encourage pas ces pratiques dont les effets secondaires peuvent affecter la croissance
«Particulièrement chez les jeunes inexpérimentés, la période de séchage – où la quantité de liquides consommée chute – peut aller jusqu’à affecter les résultats scolaires ou le développement physique», soutient Alexandra Bwenge. L’APQ a d’ailleurs dû éliminer la catégorie juvénile il y a deux ans. La Coupe Prestige, l’une des dernières compétitions québécoises à accepter les mineurs, a vu son nombre d’inscriptions diminuer pour cette catégorie.
Pris d’un surplus de poids avant son orientation vers le culturisme, Steeven Bourdon s’est d’abord engagé dans ce mode de vie pour retrouver la santé. «J’ai fait ça aussi pour avoir un corps musclé. Je ne l’aurais pas fait si je ne trouvais pas ça beau», insiste ce jeune allégé de 115 livres grâce au culturisme. Le professeur adjoint du département de sociologie et d’anthropologie de l’Université Concordia, Marc Lafrance, justifie cette tendance par le complexe d’Adonis, expression qui traduit une pression sociale à posséder le corps parfait. «Même si les études se contredisent sur son existence, ce complexe peut amener les hommes à souffrir de dysmorphie musculaire», assure Marc Lafrance.
Pouvoir se pavaner sans gêne à la plage n’est pas le seul bénéfice de ce mode de vie marginal. Avec plusieurs années de pratique à son actif, Benoit Brodeur poursuit l’entraînement pour la sensation que lui procure le culturisme. «Il faut être culturiste depuis longtemps pour le vivre, mais disons que ça apporte une satiété se situant entre manger du chocolat et faire l’amour», ajoute le professionnel de 42 ans.
Crédit photo : Francis Duval
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