Un monde qui court à sa perte

Doit-on accepter aveuglément le monde actuel en ne remettant jamais rien en question? Pour Philippe Ducros, l’auteur de la pièce Dissidents, et le metteur en scène et acteur, Patrice Dubois, l’opposition et la contestation sont essentiels à la survie de l’homme dans la société effrénée et obsédée par le progrès dans laquelle nous sommes confinés.

Sur une scène dénudée, un homme est captif et se claustre dans un mutisme depuis un mois. Son crime reste mystère. Le personnage principal, brillamment interprété par Patrice Dubois, lance un cri dissident face à une société aveugle de progrès. En intervalle, trois personnages lui rendent visite, le questionnent et tentent de le faire passer aux aveux. Une femme, jouée par Évelyne Gélinas, représente l’interrogatoire «humain» et sensible, tandis que le personnage de Mike, un psychiatre atteint de trouble envahissant du développement, interprété par Sébastien Dodge, utilise une méthode plus affligeante. Inspiré du psychiatre américain, Donald Cameron, Mike use de techniques de manipulation de la psyché et de la mémoire sur le détenu. «On ne torture plus comme des barbares… On connaît maintenant en détail les étapes de la destruction de la psyché, et du démantèlement total de la personnalité.» Seule sa fille, incarnée par Marylin Castonguay, parvient à le faire revenir sur terre. En sa présence, son penchant paternel et tendre refait surface et lui rappelle ses actes.

Les révoltes du printemps arabe et les manifestations d’Occupy Wall Street ont eu un impact direct sur l’essence de la pièce Dissidents. Inspiré par L’Homme révolté d’Albert Camus, une brève histoire du progrès de Ronald Wright ainsi que le documentaire Survivre au progrès de Mathieu Roy, l’excellent texte de Philippe Ducros suscite une réflexion chez le spectateur et le bouscule allègrement dans son confortable quotidien. «L’humain est confiné à agir localement, par gouttes successives sur le monde. Sur «son monde», clame Patrice Dubois. C’est pourquoi le personnage principal se révolte et, à travers sa violence, espère avoir un impact assez puissant pour ébranler les consciences de plusieurs.

Dissidents, une production du Théâtre PÀP présentée du 6 au 31 mars à l’Espace Go. M.E.S. de Patrice Dubois

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