En cinquième vitesse

L’édition 2010 du Festival de Cannes aura été celle d’une panne sèche du cinéma, d’une compétition officielle presque sans cinéaste de renom. Cette année, c’était tout le contraire : Almodovar, Moretti, Von Trier, les Dardenne, Allen, Van Sant, Kaurismäki et Malick présentaient leur film, pour ne nommer que ceux-là. C’est au niveau du palmarès que tout s’est gâché. C’est ainsi qu’un film dont la sélection même en compétition officielle avait été questionnée, Drive de Nicolas Winding Refn (la trilogie Pusher, Bronson, Valhalla Rising), s’est sauvé avec le prestigieux prix de la mise en scène. Il y a eu de la chigne et de l’émoi, et quand on voit le film, on comprend pourquoi. Si certains disent que Refn a un style bien à lui, on peut aussi affirmer le contraire; il est évident que la démarche du cinéaste danois tend vers celle des films d’action hollywoodiens.

Dans Drive, Ryan Gosling incarne un jeune as de la conduite automobile qui, le jour, met à profit son talent au cinéma comme cascadeur et au garage comme mécanicien, et la nuit, comme chauffeur pour des cambrioleurs voulant prendre la fuite rapidement… Portant des chandails ajustés et un blouson blanc avec un scorpion doré dans le dos, les petits gants de cuir aux mains et le cure-dent à la bouche, Driver (son nom n’est en effet jamais mentionné) a tous les attributs de l’impassible et séduisant bad boy. Ce personnage un peu surhumain, « mi-homme, mi-machine » pour employer les mots de Refn, oscillant entre le bien et le mal, mène donc une vie solitaire, jusqu’au jour où il rencontre sa nouvelle voisine qui habite seule avec son garçon. Pris au sein d’une affaire complexe, Driver est ensuite projeté dans un tourbillon de violence impliquant plusieurs autres personnages, ce qui vient pas mal gâcher l’histoire préalablement installée.

La mise en scène récompensée n’est pas très originale, mais elle est efficace. Les angles et les prouesses techniques de la caméra, le montage très ciselé, la trame musicale stimulante et enveloppante, les couleurs saturées, le mélange de l’humour noir, du mélodramatique et de la violence crue; tout contribue à faire de Drive un objet bien huilé et divertissant. Cependant, si la première séquence du film donne le ton, excellente et digne d’un bon thriller, le reste n’est qu’exercice de style et collage d’effets. Adapté d’un roman de James Sallis, la faiblesse première du film est celle du scénario, plutôt vide et immoral.

En salles le 16 septembre.
Drive, de Nicolas Winding Refn, États-Unis, 100 min.

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