Les crocos de la coopération

Courtoisie Atopia Distribution Inc.

Ils sont de plus en plus nombreux à filmer l’Afrique. Le continent noir est souvent dépeint sous les mêmes thèmes: famine, injustice, corruption. Et le dernier film de Robert Morin, tourné au Burundi, n’échappe en rien à ce «stéréotype» de la pauvreté africaine. Avec Journal d’un coopérant, le vidéaste québécois dresse un portrait assez choquant des dessous de la coopération internationale, mais n’arrive aucunement à bâtir une tension dramatique soutenue.

Prenant cette fois les traits d’un technicien en électronique du nom de Jean-Marc Phaneuf, Morin construit son film sous la forme d’un journal épisodique. Son personnage de coopérant plein de bonne volonté, œuvrant pour une ONG de radio communautaire, se filme en train d’apprivoiser un monde inconnu. Mais il braque bien vite sa caméra sur ses collègues pas tous honnêtes et sur une population africaine soumise aux riches Occidentaux. Dans ce paysage désespérant, les seuls rayons de soleil dans les journées du technicien sont les visites d’une jeune adolescente, Mathilde, avec qui il développera une relation de plus en plus étroite.

Cet hiver, Robert Morin publiait des extraits de son film sur Internet et invitait les gens à réagir par commentaire vidéo pour faire évoluer son récit, selon une méthode de work in progress. Finalement, le cinéaste a choisi au montage de ne rien garder de ces interventions et c’est peut-être ce qu’il manque au film: le lien entre ce continent si éloigné et le quotidien des Québécois.

Morin reprend son habituelle caméra très documentaire pour tourner son film de fiction. Cependant, le procédé se veut beaucoup moins efficace que dans ses chefs-d’œuvre antérieurs, Yes Sir! Madame… et Petit Pow! Pow! Noël, qui bénéficiaient d’un commentaire beaucoup plus explosif et punché. Ce caractère provocateur chez Morin, rappelant le défunt Falardeau, nous manque grandement cette fois, du moins pour la majeure partie du long-métrage.

Jouissant malgré tout d’une conclusion très puissante et d’une métaphore très évocatrice, le film ne parvient pas, dans sa première heure, à susciter suffisamment l’émotion pour être captivant. Le côté descriptif du film fait en sorte que l’appréciation du spectateur dépend beaucoup de son niveau de sensibilité à la situation africaine. Si l’intention et le message de Morin sont clairs et nobles, l’intérêt du spectateur n’est tout simplement pas au rendez-vous.
À l’affiche depuis le 26 mars.
 
Journal d’un coopérant, de Robert Morin, Québec/Burundi, 95 min.

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