Une lutte acharnée

La grève des professeurs se poursuit

Les professeurs de l’UQAM ont reconduit la grève dans des proportions toujours plus grandes, malgré des négociations qui avaient repris à un rythme accéléré entre leur syndicat et la direction de l’Université.

 

 

 

Avec près de 100 voix de plus que la semaine dernière, 91% des membres du Syndicat des professeurs (SPUQ) ont voté pour la reconduction de la grève jusqu’au 14 avril, sous un tonnerre d’applaudissements lors de l’assemblée générale du 6 avril.

Après un silence de près de deux semaines, les pourparlers entre le SPUQ et la direction avaient pourtant pris de la vigueur. «Des négociations intensives ont eu lieu mercredi, jeudi et vendredi dernier, mais il n’y a pas eu d’offres formelles proposées par l’Université», indique le porte-parole de l’UQAM, Daniel Hébert. Depuis maintenant deux ans que les professeurs sont sans convention collective. Ils revendiquent un rattrapage salarial de 11,6% et la création de 300 nouveaux postes de professeurs.

Daniel Hébert rappelle que l’Université n’est pas à même de répondre financièrement aux demandes des professeurs. La dernière offre de l’administration, qui comprenait l’embauche de 25 professeurs et une augmentation de 4%, a été rejetée massivement par les membres du SPUQ il y a deux semaines.

Un représentant du Conseil du trésor, présent lors des négociations entre le SPUQ et la partie patronale, doit confirmer si l’UQAM recevra des subventions gouvernementales supplémentaires pour satisfaire les revendications du Syndicat, et à quel montant s’élèveront ces fonds. «Si nous n’avons pas un signal d’aide gouvernementale, notre précédente offre ne pourra pas être bonifiée», précise Daniel Hébert.

Cette intrusion du gouvernement dans les négociations a d’abord été vivement critiquée par le SPUQ, qui a toutefois saisi l’occasion pour aller chercher l’appui de l’opposition provinciale. La présidente du Syndicat a rencontré la semaine dernière la porte-parole du Parti québécois en matière d’enseignement supérieur, Marie Malavoy. Lors d’une intervention à l’Assemblée nationale, cette dernière a pressé la ministre de l’Éducation, Michelle Courschesne, de prendre les mesures nécessaires pour résoudre un conflit qui perdure depuis bientôt quatre semaines.

Marie Malavoy était présente à la manifestation pour un refinancement de l’UQAM du vendredi 3 avril, aux côtés du chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, et du porte-parole de Québec solidaire, Amir Khadir. «Les dernières révolutions sociales dont je me souvienne ont commencé comme ça: des professeurs et des étudiants, ensembles, dans la rue!» a proclamé ce dernier, devant une foule orange conquise d’avance.

 

La tension monte

Malgré une injonction qui interdit tout piquet de grève, les professeurs n’ont pas cessé les moyens de pression. Ainsi a eu lieu, le jeudi 26 mars, une assemblée réunissant tous les acteurs de l’UQAM. Pour la première fois depuis la création de l’Université, plus de 1000 étudiants, professeurs, employés et chargés de cours ont envahi le théâtre Saint-Denis pour débattre de la situation actuelle de l’UQAM.

La mobilisation étudiante a également atteint un nouveau sommet. L’Association des étudiants et des étudiantes de la Faculté des sciences de l’éducation, celle du Secteur des sciences, tout comme celle des étudiants en art, des étudiants en langues et communication et celle des étudiants en sciences humaines, étaient toutes en grève la semaine dernière.

Pour la première fois depuis 2005, l’Association étudiante de l’École des sciences de la gestion (AÉESG) s’est elle aussi jointe au mouvement pour une semaine, soit du 31 mars au 6 avril. Regroupant plus du quart des étudiants de l’Université, c’est à l’École de gestion que le ratio professeur-étudiant est le plus bas, d’après le président de l’AÉESG, Frédéric Tremblay. L’Association est d’autant plus réceptive aux revendications professorales que l’École des sciences de la gestion doit engager de nouveaux professeurs pour garder sa certification EQUIS, qui la classe parmi les 100 meilleures écoles de gestion dans le monde. Au total, plus de 30 000 étudiants étaient en grève la semaine dernière.

 

La résistance s’organise

Pour la première fois, les réfractaires aux levées de cours se sont organisés pour défendre leur point de vue. L’Alliance des étudiantes et étudiants contre la grève a été fondée. Rassemblant plus de 400 personnes dans son groupe Facebook, l’Alliance a diffusé les horaires des différentes assemblées générales pour que ses membres y votent. Son cofondateur, Raphaël Melançon, déplore que la grève soit devenue un moyen quasi systématique de protestation. «C’est certain que le SPUQ pourrait parvenir à ses fins par un autre moyen. Peut-être même plus rapidement, mais on ne le saura jamais parce qu’ils n’ont pas essayé.» Selon lui, même si les revendications des professeurs peuvent concerner les étudiants, il en résulte surtout un retard dans la formation des étudiants.

Le porte-parole de l’UQAM, Daniel Hébert, a indiqué qu’avec une quatrième semaine de grève, le prolongement de la session était désormais inévitable. Cependant, la Commission des études, qui doit établir les modalités de cette mesure, est en partie constituée de professeurs. Il faudra donc attendre la fin de la grève de ces derniers pour qu’elle puisse se réunir.

La mobilisation commence à s’essouffler. L’AÉESG et l’AFELC ne sont plus en grève depuis le 6 avril. Le retour en classe pour tous pourrait d’ailleurs arriver plus tôt que prévu. Ces derniers jours, la rumeur d’une loi spéciale, qui forcerait la fin des moyens de pression des professeurs, rôde dans les couloirs de l’Université.

 


Selon la Presse canadienne, 45 étudiants de l’UQAM ont été arrêtés le 6 avril dernier, en marge d’une manifestation sur la gratuité scolaire qui se tenait lundi dernier vers 21h30. Ils ont été interceptés par le Service de police de la Ville de Montréal alors qu’ils circulaient illégalement dans le Pavillon Hubert-Aquin. Les manifestants devront comparaître prochainement pour répondre à des accusations.

 

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