Je suis celui qui frappe dans la vie

Le combat ultime au Québec

Photo Jonathan Boulet-Groulx - À dix reprises dans la carrière de Patrick Côté, un arbitre présent dans l'octogone a dû mettre fin au combat lorsqu'il a soumis son rival ou l'a mis knock-out.

Qu’arriverait-il si un boxeur combattait un spécialiste de kung-fu? Et si un karatéka faisait face à un lutteur sumo? De ces interrogations est né le combat ultime, un sport pour gladiateurs modernes.

 

Patrick Côté est un homme occupé. Au travail, on le surnomme The Predator, principalement parce qu’il sait assommer des gens à l’aide de ses mains. «Les genoux, c’est bien aussi, mais personnellement, je préfère les coups de poings all the way.» Patrick Côté, 29 ans, est un professionnel d’arts martiaux mixtes (mixed martial arts, ou MMA). Il gagne sa vie dans le combat ultime, un sport relativement récent et généralement sanglant où deux combattants s’affrontent dans une cage octogonale.

Les adeptes de MMA mélangent, comme le nom l’indique, diverses formes d’arts martiaux. Même si les possibilités de combinaisons sont grandes, un arsenal classique de combat ultime se restreint généralement à des éléments de boxe anglaise et thaïlandaise, de lutte et de jiu-jitsu brésilien, une forme de lutte particulièrement efficace pour soumettre un adversaire par clé ou étranglement. À dix reprises dans sa carrière, un arbitre présent dans l’octogone a dû mettre fin au combat lorsque Patrick Côté a soumis son rival ou l’a mis knock-out. Ses quatre autres victoires lui ont été accordées par décision des juges, au terme de trois rounds de cinq minutes.

«À peu de choses près, les arts martiaux mixtes s’approchent du combat de rue, puisque les adversaires peuvent se frapper lorsqu’ils sont debout ou au sol, sauf que le degré de violence est moindre, car l’environnement est bien contrôlé», explique Firas Zahabi, entraîneur du champion mondial de combat ultime, le Québécois Georges St-Pierre.

Plus que du muscle
Les professionnels de combat ultime combinent la robustesse d’un bûcheron aux mains agiles d’une couturière, enchaînant avec précision et à grande vitesse les coups de poing, de pied et les prises de lutte autorisées (voir encadré Tous les coups ne sont pas permis). Selon David Côté, instructeur d’arts martiaux mixtes à Sherbrooke, il s’agit du sport le plus exigeant au monde: «Les combattants doivent non seulement travailler en salle de musculation, mais également s’entraîner et exceller dans chacun de leurs arts martiaux séparément. C’est certainement la discipline sportive la plus complète et la plus difficile, puisque toutes les parties du corps sont sollicitées, y compris le cerveau.»

La préparation de Patrick Côté est réglée au quart de tour. Il enchaîne directs, crochets et coups de genoux dans le vide, les yeux fixés sur son reflet dans le miroir. Puis, il enfile ses gants de boxe pour s’exercer contre deux, trois ou quatre partenaires d’entraînement qui alternent dans le ring pour faire pleuvoir les attaques contre lui. D’autres gants, quatre fois plus légers et laissant dépasser les doigts (les mêmes qui sont utilisés lors d’événements de combat ultime), lui servent à pratiquer ses techniques de lutte. Au sol, le corps à corps est exténuant et la sueur, abondante. Ce rituel, il le suit depuis une dizaine d’années à raison de six jours par semaine.
Difficile d’imaginer que le jeune homme sympathique, au visage ouvert et souriant, ait une telle passion pour violenter son prochain. «J’adore m’entraîner, dit-il. J’adore ce sport et j’apprécie beaucoup d’être payé pour le faire!»

Les gens qui pratiquent le combat ultime sont aussi divers que le sport lui-même. Rimouskois d’origine, Patrick Côté se destinait à une carrière dans la Gendarmerie royale du Canada lorsqu’il a regardé pour la première fois des événements de combat ultime à la télévision. Il a rapidement eu la piqûre, au moment même où cette discipline commençait à devenir un divertissement populaire. «Ça a été difficile au début à cause des préjugés, quand les gens ne pouvaient pas croire que je suis un professionnel, que je gagne ma vie comme le font les boxeurs. Maintenant, les mentalités ont changé et on voit même des filles pratiquer ce sport.»

Malgré la difficulté et l’aspect violent des arts martiaux mixtes, un nombre croissant d’amateurs les pratique pour se mettre en forme et apprendre à se défendre. Firas Zahabi enseigne à Tristar Gym, un centre d’arts martiaux de Montréal: «Certains font du MMA parce qu’ils sont des fervents amateurs de ce type de combat qu’ils ont connu grâce à la télévision. D’autres veulent apprendre des techniques efficaces. Ils ont l’impression de travailler dur pour quelque chose qui pourrait leur servir réellement dans la vie courante.»

Mais pour les professionnels d’arts martiaux mixtes, les bénéfices liés à la pratique de ce sport dépassent le simple fait de savoir se défendre.  Les organisations de combat ultime, une industrie qui génère des centaines de millions de dollars, paient grassement ceux qui sortent victorieux de l’octogone.
Après tout, quelle autre compagnie offrirait des primes de 65 000 dollars lorsqu’un de leurs employés en assomme un autre avec style.


Plus qu’un phénomène émergent
L’Ultimate Fighting Championship (UFC), fondé en 1993 aux États-Unis, est l’organisation qui a popularisé les compétitions d’arts martiaux mixtes en Amérique du Nord. Le 18 avril prochain, le Centre Bell accueillera un important gala de combat ultime, le deuxième organisé par l’UFC en sol québécois. L’événement se tiendra à guichet fermé; tous les billets ont été vendus en quelques semaines, bien qu’aucun Québécois ne prenne part aux matchs les plus attendus.


Tous les coups ne sont pas permis

Même si les adversaires qui s’affrontent dans l’octogone semblent n’obéir à aucune règle, certaines techniques demeurent interdites. La liste des coups potentiellement trop dangereux inclut, entre autres, toute attaque à la gorge ou aux parties génitales, les morsures, les coups de tête et l’insertion d’un doigt dans un orifice quelconque. Un combattant ne doit pas non plus porter de coup de pied ou de genou à la tête de son rival lorsque celui-ci est au sol.
Les combattants ne restent pas sans protection. Tous portent un protecteur buccal!

 

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