Handicaps invisibles

Troubles de l’apprentissage, de l’attention et de la santé mentale

Les étudiants qui souffrent de troubles de l’apprentissage, de santé mentale ou d’un déficit d’attention et d’hyperactivité n’ont pas de chaise roulante ou de canne blanche pour montrer au monde leur handicap. Pour les appuyer, l’Université développe de nouveaux services, dont un projet pilote de tutorat.

 

 

L'handicap des étudiants qui souffrent de troubles de l'apprentissage, de santé mentale ou d'un déficit d'attention et d'hyperactivité est invisible aux yeux des gens - Photo Pascale Nycz

 

Une centaine d’étudiants de l’UQAM poursuivent leurs études supérieures malgré un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H), un trouble d’apprentissage (TA) ou un problème de santé mentale. Chaque jour, ils défient les statistiques qui les dépeignent comme des décrocheurs.

Julie Lynne Drisdelle, étudiante au doctorat en histoire de l’art, est l’une de ces personnes. Alors qu’elle effectuait sa maîtrise, elle a découvert qu’elle souffrait d’un déficit d’attention. Après des années de doute, elle a été soulagée d’apprendre la nature de ses fréquents oublis et de son éternelle désorganisation. «J’allais à mes cours, puis j’oubliais en chemin où je me rendais», se souvient-elle.

Malgré son parcours scolaire exemplaire, Julie a frappé un mur une fois rendue au troisième cycle universitaire. «Au doctorat, c’est très difficile. Je suis incapable d’avoir un angle clair dans mes travaux.» Elle craint malgré tout de dévoiler son déficit à ses professeurs pour ne pas être discriminée. «Je préfère qu’ils se fassent une idée de mon travail avant de le savoir.»

Tes tics me tiquent

La déficience de Julie est invisible aux yeux de ses collègues. D’autres étudiants, qui souffrent de problèmes plus incommodants, n’ont pas cette chance. «Moi, j’ai le syndrome de la Tourette, admet Mathieu Bergeron, étudiant au baccalauréat en sociologie. Dans mon cas, ça se manifeste par des tics nerveux. C’est plus fréquent dans les moments de stress, comme une évaluation.»

Même si la maladie de Mathieu touche près d’une personne sur 200, le jeune homme est confronté à l’incompréhension qui l’entoure. Chaque début de session, il présente à ses camarades les symptômes avec lesquels ils devront tous composer. «C’est sûr que je dérange dans une classe. Quand vient une période où je suis nerveux, j’ai plus de tics. Les gens autour de moi soupirent et se tannent.»

Être une source de distraction n’est cependant pas le principal défi auquel Mathieu est confronté. Comme le syndrome de la Tourette se marie dans son cas au trouble déficitaire de l’attention, il doit redoubler d’efforts pour remplir les exigences du monde universitaire. «Après 40 minutes de cours, j’ai besoin de prendre l’air», confesse-t-il.
Pour l’aider dans ses études, Mathieu a recours au Service d’intégration des étudiants handicapés de l’UQAM (SIEH), qui lui fournit un soutien à l’apprentissage.

Parallèlement, l’Université développe un projet pilote de tutorat pour accompagner les étudiants comme Mathieu. La conseillère à la vie étudiante France Landry est l’une des tutrices pour les uqamiens atteints du TDA/H. Elle agit comme la canne blanche d’un aveugle pour guider l’élève dans son apprentissage. «Je regarde ses besoins, comment son trouble se manifeste au plan scolaire et je travaille avec lui sur la gestion du temps et sur ses stratégies d’étude.»

Le programme de tutorat s’adresse aussi aux étudiants qui souffrent de troubles d’apprentissages comme la dyslexie, la dysorthographie, ou la dyscalculie, soit des difficultés à lire, à écrire ou à calculer. Ceux-ci, contrairement au TDA/H, sont de nature neurocognitive, donc permanents. Les personnes affectées par ces déficiences peuvent confondre les lettes, les mots, même en oublier certains; un problème crucial lorsque vient le temps de prendre des notes ou de lire de volumineux recueils de textes.

Québec à la remorque

Pour recevoir les services spécialisés de l’Université, les étudiants doivent cependant obtenir le verdict d’un neuropsychologue. L’évaluation peut coûter jusqu’à 1 000 dollars. Contrairement aux autres provinces canadiennes, Québec ne rembourse pas ces évaluations, car ni les troubles de l’apprentissage, ni le déficit de l’attention ne sont officiellement reconnus par le gouvernement provincial. «Le ministère de l’Éducation travaille actuellement pour déposer un projet de loi. On attend la reconnaissance officielle pour 2009-2010», espère Jocelyne Boulanger du service d’intégration des étudiants handicapés. D’ici là, le SIEH contourne la législation pour faire admettre ces élèves parmi les handicaps physiques déjà reconnus.

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