Orange Orange, c’est un Casio, du beat-box, une petite guitare et les voix de Sabrina Bellemare et Dominique Hamel. C’est surtout un univers musical inusité qui a su séduire les amateurs de tubes colorés lors de son passage aux FrancoFolies de Montréal cet été.
Orange Orange est le projet personnel de Dominique Hamel (DomHameLLL), membre de la formation Gatineau et de Sabrina Bellemare, également choriste pour ce groupe qui mélange avec succès hip hop et punk rock. Officiellement formé en février dernier, le duo musical a réussi depuis à se démarquer sur la scène locale.
Pour l’instant, un échantillon de trois chansons enregistrées live dans leur appartement du plateau Mont-Royal et disponible sur MySpace est leur unique carte de visite. Un mini-album est prévu pour novembre, la recherche d’une maison de disque suivra sous peu. «En attendant d’avoir un label, on travaille à préciser notre musique. On a déjà deux pièces de terminées sur les six du EP. Étant donné que chacune de nos chansons est un hit planétaire et intergénérationnel, on travaille fort », explique le chanteur pince-sans-rire.
S’offrir les FrancoFolies de Montréal quelques mois seulement après la naissance du groupe n’était pas dans les plans du duo. Le programmateur du festival, Laurent Saulnier, voyait la chose autrement. « On n’a rien provoqué pour notre groupe. Laurent est venu voir tous nos spectacles et nous a offert une scène au Festival. C’était un grand privilège pour un groupe aussi jeune de participer aux Francos», avoue Dominique Hamel. Le choix n’aura pas été facile pour Laurent Saulnier, qui devait s’assurer que le jeune duo ait assez de matériel pour occuper la scène pendant 60 minutes. L’organisateur savait cependant à qui il avait affaire. «Je connais le travail de Dominique Hamel à cause de Motus 3F et de Gatineau. Je le suis depuis ses débuts. J’aime l’idée de bidouillage musical et la chimie entre les deux. Leur complicité est intéressante.»
Sur scène, les deux complices font des étincelles, et pour cause: tous les deux ont étudié en théâtre, lui à l’École supérieure de théâtre de l’UQAM et elle à Lionel-Groulx. «Sab et moi, on déplace beaucoup trop d’air sur une scène. Nos shows ne sont vraiment pas intimes. Idéalement, il faudrait toujours avoir un public de 2 000 personnes pour que le spectacle ait du sens, même si on est juste deux», affirme le musicien.
Doublement intense
Le fruit, la couleur, deux fois le fruit, deux fois la couleur, le fruit et la couleur… Quelle est la signification du nom Orange Orange? «On est deux, on se répète dans nos paroles, on fait des loops dans notre musique. […] Ça peut être laissé à de multiples interprétations et on aime les double sens. C’est très conceptuel, mais notre musique n’est pas humoristique. Pas besoin de pleurer sur un tempo lent pour faire de quoi de sérieux», précise Sabrina Bellemare.
Chaque chanson d’Orange Orange part d’un concept. Dans Et je pleure, par exemple, une phrase est répétée du début à la fin. Le beat boxeur utilise le terme «constructivisme» pour décrire ce processus créatif. Un concept émerge d’abord, puis le texte s’impose et la mélodie et les effets enrobent le tout.
Les textes d’Orange Orange sont volontairement moins colorés que les rythmes qui les accompagnent, question de créer un décalage dérangeant pour l’auditeur. L’ironie sert aussi leur propos. Qui n’a pas déjà dansé sur I will survive avec un sentiment de bien être, alors que la chanson est loin d’être une ode au bonheur? «On ne rit pas d’un certain sujet, on en parle en l’exploitant avec son opposé, une dichotomie en ressort. On met une musique entraînante sur un texte triste. C’est le bassin qui bouge et la tête qui pense», explique Sabrina. Selon le couple, bouger et danser traduit la présence de vie et d’espoir.
Laborieusement pop
Difficile de catégoriser le type de musique que fait Orange Orange. L’adjectif pop est cependant celui qui revient le plus souvent. Pour Sabrina Bellemare, la bonne pop est celle qui n’est pas facile, qui demande une recherche approfondie avant d’en arriver au résultat.
Les références à d’autres groupes font partie de cette recherche de style. Pour Orange Orange, le groupe Gorillaz et le chanteur Beck, entre autres, ont été des inspirations majeures lorsqu’est venu le temps de se forger un son bien à eux. «Orange Orange c’est du beatbox bucal, du Casio, une petite guitare et du chant […]. C’est de la pop de recherche et d’avant-garde. Nos techniques sont laborieuses. Avec rien, on fait de quoi de vraiment gros. On est seulement deux, mais on veut sonner comme si on était dix, et on y arrive», affirme avec confiance le chanteur du groupe, pour qui l’univers de la musique électronique minimaliste est un terrain bien connu. Le musicien a fait partie avec Dominique Laguë du projet Motus 3F, où la voix transformée à l’aide de différents engins électroniques faisait office de band complet.
Malgré tout le mal qu’il se donne pour réinventer la pop à sa façon, Dominique Hamel ne désire pas que sa musique soit considérée comme expérimentale et difficile d’approche, seules ses techniques musicales le sont, explique-t-il. «Ce qu’on fait est beaucoup plus accessible que bien des musiques qui sont moins expérimentales. C’est un défi que nous avons relevé. On fait simple pour que les gens embarquent facilement. Ensuite, l’enrobage de la chanson est tellement avant-gardiste que les gens plus pointilleux sur les aspects techniques et nouveaux vont être satisfaits.»
Sa collègue ajoute, en guise de résumé: «Orange Orange, c’est l’enrobage d’une simple chanson, qui pourrait être jouée seulement avec du piano et de la voix. La pulpe, la pelure et le zeste, c’est l’électro.» Le fruit musical n’est pas encore mûr qu’il suscite déjà bien des convoitises.
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