Elle est blonde, brune, parfois rousse. Tenue légère, tailleur sexy, elle remue son jeune popotin au rythme de chansons tantôt dance, tantôt pop. Son souhait le plus cher? Faire de son politicien favori son compagnon de vie. Tadam! Voici la pitoune politisée.
Dernière coqueluche en lice? Stephen Harper! Le chanceux a maintenant sa Harper Girl, ce qui lui permet de se hisser au rang des Poutine et Obama de ce monde. À la mi-septembre a en effet été lancé sur le portail Internet Mashline.com un clip audio pour le moins inspiré, I’ve Got a Crush on… Harper, qui reprend presque intégralement la célèbre I Got a Crush… on Obama, mise en ligne en juin 2007 sur le portail Internet de Barely Political. Visionnée neuf millions de fois, la vidéo américaine met en scène la très charnelle Amber Lee Eltinger (dite Obama Girl), qui use de synchronisation labiale (ou lip-synch, comme vous voulez) pour mettre à jour son fantasme pour le candidat démocrate à la présidence, Barack Obama.
Heureusement, la chanteuse canadienne nous épargne (pour l’instant) la danse en bikini devant un Stephen Harper courant en maillot sur une plage ensoleillée pendant qu’elle prononce les paroles So tall and sexy, you’re so fine et un peu plus loin, You can Harper me tonight (pour ceux qui ne comprennent pas cette dernière, on pourrait traduire par quelque chose comme «Tu peux me schtroumpfer ce soir»).
Cet épanchement d’œstrogène «groupiesque» rappelle le succès électro-pop russe Takogo, kak Putin (Je veux un homme comme Poutine) popularisé au début des années 2000 par le groupe – très – féminin Poiouchtchie Vmeste («allant ensemble», nom dangereusement proche de celui porté par le groupe jeunesse pro-Poutine Idouchtchie Vmeste, «ceux qui avancent ensemble»). Le vidéoclip montre trois jolies jeunes femmes souffrant de «papillotite» aigue des cils et chantant leur désir de se trouver «un homme comme Poutine, plein de force, qui ne boirait pas, qui ne [lui] ferait pas de peine, qui ne s’enfuirait pas». Même le président américain Harry S. Truman (1945 à 1953) avait sa Harry Girl.
Dérision? Réel engagement politique? Manipulation du parti? Difficile à dire. Dans le cas du groupe russe, le producteur Nicholaï Gastello avait d’abord occupé les fonctions de secrétaire à la Cour suprême, s’inscrivant ensuite en 2002 dans le mouvement pro-Poutine. De quoi laisser le doute planer. La Obama Girl a pour sa part été approchée pour ses talents d’actrice par l’équipe de Barely Political, site Internet voué à la satire politique et au divertissement. Et pour Harper? Mashline.com affirme dans un communiqué qu’il s’agit d’une manière de faire connaître des talents canadiens tout en prouvant l’influence que peuvent avoir les médias sociaux sur la joute politique. Fait intéressant: la porte-parole de Mashline.com, Geneviève Desjardins, est aussi une ancienne responsable des communications de Stephen Harper.
Quant aux minettes mises en scène, leur discours est généralement plutôt vide. «Je ne savais pas pour qui j’allais voter, mais maintenant, je sais que c’est pour Obama», a déclaré Amber lee Eltinger sur les ondes de CNN. Quant aux trois Russes, elles se considèrent comme un «Projet social positif», sobriquet trouvé en remplacement de «Brigade de la propagande», reçu de leur propre producteur, selon une entrevue donnée à la Pravda, journal populaire russe. La Harper Girl (Mashline Girl si on veut être exact) n’a quant à elle pas encore été identifiée, mais le site assure qu’une vidéo sera dévoilée sous peu.
Si on voulait nous prouver que les belles filles s’y connaissent aussi en politique et qu’elles peuvent intelligemment prendre part au débat, c’est raté.
Des années de lutte pour obtenir le droit de vote universel et l’égalité des sexes et on en revient à ça: «Votez pour lui, il est plus sexy que les autres.»
Bravo les filles!
Caroline Chrétien
societe.campus@uqam.ca
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