Accords mineurs pour émotions majeures

La mélancolie musicale et la tristesse forment un duo qui s’harmonise couramment. Les effets cognitifs de l’écoute de musique triste sont cependant mitigés entre une utilisation bénéfique et une rumination négative.

Plusieurs personnes choisissent l’écoute d’un type de musique selon les émotions présentes à un moment précis. « La musique est associée aux émotions, parce qu’elle nous rejoint, même si, parfois, on ne peut pas savoir exactement pourquoi et comment elle nous rejoint », explique la professeure agrégée émérite en musicothérapie de l’Université Concordia Guylaine Vaillancourt. 

Elle affirme également que la définition de musique triste est propre à chacun(e). « Pour ce qui est de la musique triste, c’est un qualificatif, parce qu’on a des associations avec la musique selon notre vécu », explique la professeure. La musique peut être associée à un moment précis où elle était diffusée, et créer ainsi un lien entre la chanson et le moment. 

« C’est pour ça qu’on va choisir spécifiquement les chansons qui nous parlent le plus, qui résonnent le plus avec nous pour permettre de remettre l’émotion. Vu qu’elle est déjà dans la chanson qu’on a choisie, on appelle ça un principe de résonance », explique le musicothérapeute au Département de psychiatrie du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) Dany Bouchard. 

Mettre en mots ses émotions

L’écoute de musique mélancolique avec des paroles peut être bénéfique dans certains cas. Un de ses points positifs est qu’elle aide à nommer et à valider des émotions négatives, afin de mieux les gérer. 

« Ce qui est vraiment bénéfique, c’est de pouvoir mettre des mots sur nos maux »

Frederick Grouzet, professeur associé en psychologie à l’Université de Victoria

« Je pense que ça dépend vraiment de la situation, mais, la plupart du temps, ça fait exacerber mes émotions, donc je me sens plus libérée », témoigne Stéphanie Farhan, étudiante en sociologie à l’UQAM.

Bien qu’elle puisse être positive, la musique mélancolique peut parfois être utilisée de façon malsaine, par exemple, lorsqu’elle nous fait tomber dans la rumination. Selon une étude de Frontiers in Human Neuroscience, les personnes écoutant fréquemment ce type de musique ont plus tendance à être anxieuses ou agressives. 

« Parfois, ça m’aide à mettre des mots et des sentiments sur ce que je ressens, et je me sens mieux parce que j’ai pu évacuer le sentiment. D’autres fois, ça empire parce que ça fait comme un effet boule de neige », témoigne Naïma Davidson, étudiante en relations et droit international à l’UQAM. 

Selon Frederick Grouzet, l’écoute de musique mélancolique est souvent liée à de la nostalgie. Cette émotion peut être positive, même lors de l’écoute d’une œuvre musicale mélancolique. 

« Si c’est une musique triste qui n’est rattachée à aucun souvenir, ça va nous rendre tristes et entretenir cette tristesse. Mais, si c’est une musique triste qui nous rappelle des moments heureux ou des périodes de notre vie où l’on était moins seul, là, c’est positif », explique-t-il.

La musicothérapie comme outil

Selon l’Association québécoise de musicothérapie (AQM), la musicothérapie est une discipline utilisant la musique comme traitement afin de combler des besoins cognitifs. Elle se construit entre le ou la client(e), la musique et le ou la musicothérapeute. Le ou la musicothérapeute accompagne donc sa clientèle, puis discute des objectifs et du plan d’intervention convenu afin d’utiliser la musique comme moyen d’expression et comme voie de guérison.

« C’est du cas par cas. C’est pour ça que nous, en tant que musicothérapeutes, on prend le temps de s’asseoir avec la personne, on prend le temps d’évaluer et de voir ce dont la personne a vraiment besoin », dit Dany Bouchard.

Mme Vaillancourt souligne que la musicothérapie est une bonne solution lorsque quelqu’un éprouve de l’enfermement musical et est incapable de fonctionner. « Il ne s’agit pas juste d’ouvrir des émotions avec la musique, il y a une manière éthique de le faire pour ne pas causer des dommages, finalement, au niveau émotionnel ou [pour ne pas] aggraver les symptômes », renchérit-elle.

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