Le stéréotype de la planche à roulettes comme activité réservée aux adolescents disparaît progressivement. La diversité au sein de ce sport est grandissante, en particulier depuis son ajout aux Jeux olympiques de Tokyo de 2021. Tant au niveau de l’âge que du genre, de nouvelles sous-communautés voient le jour, mais certains préjugés sociaux sont toujours présents pour les adultes qui pratiquent le skateboard.
Popularisé dans les années 80, en Californie, le skateboard a d’abord été connu comme un sport très marginal, pratiqué majoritairement par les jeunes garçons. « C’était un peu plus underground, […] comme le breakdance », explique le responsable des opérations du parc intérieur Taz Skatepark, Ghyslain Gingras. Selon plusieurs adeptes, les femmes y étaient peu présentes et le profil type se centrait plutôt sur l’adolescent rebelle. La skateuse professionnelle Annie Guglia mentionne d’ailleurs que c’est seulement deux ans après avoir commencé le skateboard qu’elle a pu rencontrer une autre femme qui en faisait aussi.
Aujourd’hui, cette image est dépassée et la communauté est désormais beaucoup plus mixte, selon plusieurs adeptes interrogé(e)s par le Montréal Campus. Des groupes de femmes et de minorités ethniques ou sexuelles se forment au sein du sport, ce qui réjouit la skateuse Annie Guglia. Des adultes de tous âges choisissent également de se mettre à la pratique du skateboard pour en faire un loisir, une passion ou simplement pour se déplacer.
Fervent skateur depuis son jeune âge et propriétaire de l’entreprise Papillon Skateparks, Hugo Papillon fait remarquer qu’avec la transformation de ce sport marginal en pratique populaire, plusieurs parents « se [remettent] à leur passion de jeunesse avec leurs enfants ». Selon lui, le fait de croiser une personne dans la trentaine au skatepark ne sort plus de l’ordinaire aujourd’hui, alors que les skateurs considérés comme étant âgés avaient à peine 25 ans lorsqu’il a débuté ce sport, en 1999.
Des préjugés sociaux qui persistent
Bien que la communauté du skateboard soit de plus en plus inclusive, les adultes qui pratiquent ce sport peuvent ressentir certains jugements, selon le propriétaire de l’entreprise ComeBack Skateboards et animateur de l’émission Skate le monde Mathieu Cyr. « Dans la société en général, souvent les gens te considèrent un peu comme un adulescent, comme quelqu’un qui ne veut pas vieillir », souligne-t-il. Pourtant, ce n’est pas le cas pour d’autres sports, où la participation d’adultes plus âgé(e)s est plutôt signe que ces personnes se tiennent en forme. La skateuse Annie Guglia indique également que « c’est une construction sociale de penser que de taper sur une balle de tennis […] c’est plus mature que de faire flipper un skate sous tes pieds ».
Si ces jugements sont présents dans la société, ils le sont beaucoup moins au sein de la communauté du skate, selon Hugo Papillon. « C’est un sport rassembleur qui trouve ses origines dans l’inclusion », affirme l’entrepreneur de 33 ans. « À la base, nous étions tous des “outcasts” », ajoute-t-il.
C’est entre autres une plus grande ouverture dans le milieu, autrefois perçu comme intimidant, qui permet à plus de débutant(e)s de se mettre au sport, selon le jeune skater Félix Gagné-Tremblay. « Des adultes skaters, il y en a toujours eu », explique-t-il. « La différence […] c’est qu’avant, tous les adultes qui [en] faisaient étaient des [personnes] expérimentées [qui le pratiquaient] depuis 20 ans. » Adepte du sport depuis six ans, il souligne que la fréquentation des skateparks par des adultes qui sont nouveaux et nouvelles au sport augmente.
De marginal à mainstream
Même si certain(e)s skateurs et skateuses ne se réjouissent pas de voir leur sport transformé, la professeure en sociologie du sport à l’Université de Montréal, Suzanne Laberge, affirme que ces changements sont fréquents et constants dans le monde sportif. Elle mentionne que ce phénomène est similaire à celui du surf, qui était d’abord pratiqué par des gens marginaux, puis qui a été récupéré et commercialisé.
À 18 ans, le skater Félix Gagné-Tremblay fait partie des jeunes qui accueillent positivement l’inclusivité grandissante au sein du skateboard. Celui-ci souhaite « que le skate devienne un sport reconnu […] et accessible à tout le monde. »
Le skateboard sera pour la première fois une discipline aux Jeux olympiques de Tokyo, cet été. Cela implique une mutation quant à l’image et la crédibilité de ce sport. « Maintenant, [la pratique du skateboard] est vue comme quelque chose de positif », exprime la skateuse professionnelle Annie Guglia. « Les gens comprennent tout le travail, la persévérance, la résilience et la patience que le skate demande et ça fait du bien », reconnait-elle.
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