Faire face à la mort de son enfant avant même qu’il n’ait atteint sa première semaine de vie après la naissance, voilà la dure réalité d’une femme sur cinq qui enfante. Malgré la statistique élevée et sans ambages, un nuage d’incompréhensions et de lacunes surplombe encore aujourd’hui le deuil périnatal.
Le décès périnatal survient entre le moment de la fécondation et les sept premiers jours de vie du bébé. «Pour les autres [personnes], c’est un événement triste, mais pour les parents, c’est un deuil réel», explique l’accompagnante à la naissance et cofondatrice du groupe de soutien au deuil périnatal Les Perséides, Sylvie Blouin. Souvent, un accompagnement moral et professionnel est souvent nécessaire pour les parents qui traversent ce genre d’épreuve.
Candide Proulx a vécu une fausse couche à l’âge de 26 ans, alors qu’elle complétait sa maîtrise en études littéraires à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Pour elle, il n’a pas été question de tabou. «J’étais capable de dire que j’avais été enceinte et que je n’étais plus enceinte», confie-t-elle. Ses proches ont su être présents pour elle et faire preuve de beaucoup d’empathie. L’accompagnement professionnel ne lui a pas été offert à ce moment de sa vie, mais elle aurait aimé y avoir accès, ajoute la maman ayant vécu son deuil il y a plus de 10 ans.
Or, la situation de Mme Proulx n’est pas représentative de tous les cas de deuil périnatal. Les façons de vivre la perte d’un(e) enfant sont infinies et varient d’une personne à l’autre.
Processus de guérison
De nos jours, la plupart des hôpitaux au Québec offrent un service d’accompagnement psychologique pour les parents qui vivent un deuil périnatal. L’aide varie toutefois d’un établissement à l’autre et rien ne peut garantir le soutien qu’une famille recevra. À l’hôpital Pierre-Le Gardeur, situé à Terrebonne, les médecins, les infirmiers et les infirmières offrent du soutien psychologique immédiat et transfèrent ensuite les parents au CLSC, témoigne l’infirmière clinicienne en obstétrique Catherine Lambert. «Il y a un suivi qui se fait par téléphone dans certains cas», précise-t-elle.
Le groupe de soutien au deuil périnatal basé à Québec Les Perséides s’est donné comme mission, il y a 17 ans, d’apporter de l’aide aux parents endeuillés. Ces derniers peuvent, par exemple, assister à de nombreux ateliers de partage ou à des rencontres individuelles. «On aide les parents à se créer des souvenirs bienveillants et qui ont été créés dans le respect, explique Sylvie Blouin. On leur permet en même temps d’être parents pour cet enfant-là.»
Les groupes de ce genre sont de plus en plus présents au Québec, mais n’offrent pas tous un service aussi complet que celui des Perséides. Pour certains parents, une aide aussi poussée s’avère nécessaire et doit même dépasser celle offerte par les groupes d’accompagnement. D’autres ne ressentent pas le besoin d’en faire partie. Comme pour chaque deuil, le soutien nécessité par les parents peut varier, entre autres en fonction de leur situation conjugale et personnelle.
«La perte d’un bébé, ça engendre toute une réorganisation de son plan d’avenir et une réorganisation personnelle quant à l’estime de soi», explique la psychologue spécialisée dans les interventions à la psychosomatique, aux techniques de reproduction avancées et au deuil périnatal, Danièle Tremblay. «Ce n’est pas tout le monde qui ressent une énorme tristesse. Il arrive qu’une femme soit ambivalente», dit-elle.
Deuil féminin?
Les experts et les expertes consulté(e)s par le Montréal Campus ont mentionné la complexité du processus pour les hommes, qui vivent l’épreuve différemment puisqu’ils n’ont pas porté l’enfant. Dans plusieurs cas, le partenaire voudra être présent pour sa conjointe et aura de la difficulté à vivre son propre deuil, souvent marqué par un grand sentiment d’impuissance. «Il y a juste la mère qui l’a porté et qui a déjà commencé un processus d’attachement», renchérit la psychologue Danièle Tremblay.
«Pour les hommes, c’est quelque chose de plus mystérieux. Je sentais de l’empathie, mais dans leur regard je voyais qu’ils ne savaient pas quoi dire ou quoi faire», témoigne Candide Proulx.
Le Québec développe actuellement une plus grande offre de soutien aux parents endeuillés et, les groupes d’accompagnement étant plus nombreux, la méconnaissance qui entoure sur le deuil périnatal se dissipe peu à peu.
Photo William d’Avignon | Montréal Campus
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