À l’ère des médias sociaux, les campagnes électorales des candidates et des candidats peuvent être entachées par des scandales qui parfois passent inaperçus, mais qui peuvent aussi faire beaucoup de vagues.
Au début de la présente campagne électorale fédérale, des images de Justin Trudeau arborant un blackface il y a près de 20 ans ont refait surface et celui-ci a dû s’expliquer. En 2005, c’est l’ancien chef péquiste André Boisclair qui faisait face à un scandale, celui-ci relié à sa consommation antérieure de cocaïne.
Selon le candidat du Bloc québécois dans la circonscription d’Hochelaga, Simon Marchand, il est ridicule de penser que les politiciens ont un passé blanc comme neige. « Je pense que la population doit apprendre à ajuster ses attentes envers les politiciens et politiciennes », précise-t-il. À son avis, les personnes qui travaillent en politique le font par passion. Il croit que le public n’est « pas prêt à accepter » que les politiciens et politiciennes peuvent commettre des erreurs.
Même son de cloche de la part du professeur en journalisme à l’Université de Montréal Alain Saulnier. « Il ne faut pas oublier que les politiciens sont avant tout des êtres humains. Ils n’ont pas toujours mesuré la portée de leurs gestes », affirme-t-il.
Pour sa part, le professeur associé au Département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Benoit Coutu, affirme que les politiciens tentent de montrer qu’ils sont parfaits. Il compare ce phénomène à une démarche de recherche d’un emploi. « Les personnes qui vont t’engager savent que tu vas dire que tu es le meilleur, mais ils veulent voir si tu vas jouer durant l’entrevue et si tu vas continuer de le faire une fois que tu seras engagé », explique-t-il.
La part de responsabilité des médias
Si les médias mettent de l’avant des vieilles histoires des candidats et candidates, c’est parce qu’ils sont paresseux, dit Alain Saulnier. « La circulation de l’information qui était autrefois du domaine privé est devenue du domaine public », mentionne-t-il. Pour celui qui est aussi l’ancien directeur de l’information de Radio-Canada, l’arrivée des réseaux sociaux a, entre autres, provoqué ce changement.
Bien que Saulnier croit que les médias ont le droit de mettre ces histoires de l’avant, il est aussi d’avis qu’ils devraient parler d’enjeux plus intéressants. « En tant que journaliste, on devrait consacrer davantage de temps et d’énergie à chercher qui financent les partis politiques plutôt que de savoir combien de photos un candidat a de lui tout nu », précise-t-il.
Lors d’un entretien avec le Montréal Campus, le candidat bloquiste Simon Marchand a mentionné que les journalistes se sont déplacés pendant six jours dans sa circonscription non pas pour lui parler d’enjeux politiques, mais pour filmer ses pancartes qui ont été vandalisées. « Parler d’enjeux, c’est moins sexy et ça attire moins l’attention [des médias] que ces affaires-là, insignifiantes et sans intérêt », confie-t-il.
Quel impact?
D’après M. Coutu, il est possible que le passé des politiciens et politiciennes nuise à leurs partis, lors d’une campagne électorale. Cependant, il pense que l’incident du blackface a plutôt aidé Justin Trudeau. « Cet événement a fait en sorte que chacun des partis politiques a dû nettoyer son propre parti », affirme-t-il.
Depuis ce scandale, le chef du Parti conservateur, Andrew Scheer, a expulsé sa candidate dans la circonscription de Burnaby-Nord–Seymour, en Colombie-Britannique, Heather Leung, en raison de propos homophobes qu’elle a tenu durant la campagne. Le Journal de Montréal a également révélé que quatre candidats du Bloc québécois, Caroline Desbiens, Lizabel Nitoi, Valérie Tremblay et Claude Forgues, avaient tenu des propos haineux et dégradant envers l’islam sur les réseaux sociaux. Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a décidé de ne pas renvoyer ces candidats.
M. Coutu pense qu’à force de passer en reprise les controverses et les scandales des candidats et candidates, l’intérêt envers les campagnes électorales peut diminuer chez l’électorat. Selon lui, la population se lasse d’entendre jour après jour ces histoires. « C’est comme un plat trop gras: la première bouchée, tu trouves ça bon, mais tu finis par te tanner à long terme ».
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