La Société des rédactrices du Montréal Campus a récemment confirmé l’adoption d’une politique de féminisation des textes, une démarche qui se veut innovante – mais avant tout nécessaire – pour rétablir l’équilibre en matière d’égalité des genres.
Cette décision a été adoptée lors de l’assemblée générale du 9 novembre dernier. Un amendement important a par la suite été confirmé lors d’une autre assemblée générale tenue le 10 janvier.
Cela fait donc quelques semaines que les lectrices et les lecteurs du journal indépendant de l’UQAM côtoient cette nouvelle politique rédactionnelle, dans laquelle le masculin ne l’emporte plus systématiquement sur le féminin.
Cette volonté de se sensibiliser aux réalités des intervenantes et des intervenants issu(e)s de la diversité sexuelle et d’adopter formellement une politique d’écriture épicène a fait l’objet de nombreux débats au Montréal Campus dans les dernières années. Maintenant en place, cette politique est appelée à évoluer selon les discussions et réflexions futures des artisanes et des artisans du journal.
Le choix qu’ont fait les membres du Montréal Campus, c’est celui de briser les ancrages journalistiques parfois intransigeants au profit d’une plus grande inclusion. Si certains médias traditionnels saluent les initiatives en ce sens, peu transforment réellement leurs manières de faire. Au nom de la neutralité journalistique, ces derniers gardent leurs distances avec l’écriture épicène, qui offre une représentation égale des femmes et des hommes, et optent pour le statu quo, qui fait néanmoins ressortir une lacune fondamentale de langue française.
Une chose est sûre, la politique de féminisation des textes adoptée au Montréal Campus se base sur le principe que le français n’est pas une langue paritaire. Il faut remonter aussi loin qu’au 17e siècle pour retracer cette décision arbitraire – prise par des hommes – selon laquelle « le masculin l’emporte sur le féminin », un adage à ce point intégré aux mœurs qu’il est aujourd’hui difficile de s’en départir.
Dans le cas du Montréal Campus, journal étudiant d’une université à vocation sociale, il va de soi que les manquements à la racine de la langue française sur le plan de l’égalité des genres peuvent être corrigés, et ce, sans affecter sa tradition de rigueur et d’objectivité. De nombreux aspects de sa nouvelle politique s’inspirent d’ailleurs des recommandations de l’Office québécois de la langue française, qui voue une importance réelle à la valorisation de la féminisation des textes et de la rédaction épicène.
En pratique, les adjectifs et les participes passés accordés comportent désormais une marque du féminin par l’entremise de doublets abrégés, mis entre parenthèses. Les noms communs désignant des personnes, eux, sont formés à l’aide de doublets longs, accordant autant d’importance au féminin qu’au masculin.
Au fond, l’ajout de marques d’accord délaissant l’utilisation du masculin générique n’est pas nécessairement une signature militante, comme la bienséance journalistique pourrait le prétendre. Il représente plutôt un réveil face aux objections académiques qui freinent depuis plusieurs années le progrès de toute politique de rédaction inclusive.
Dans la même veine, le Montréal Campus s’engage à employer des termes épicènes au lieu de termes genrés pour désigner des groupes, une manière d’englober l’ensemble des voix en présence. Évidemment, comme il a l’habitude de le faire, il demeure sensible quant à la présentation des personnes non binaires dans ses articles.
Les intervenantes et les intervenants consulté(e)s sont également libres de choisir le pronom qui les désignera. Enfin, au même titre que la société québécoise à la fin des années 1970, et comme le recommande l’Office québécois de la langue française, le journal féminise les titres des métiers et des professions.
Cette politique de féminisation des textes est un grand pas en avant. Comme mentionné plus tôt, elle sera appelée à évoluer au fil des discussions avec les communautés de la diversité sexuelle et de la pluralité des genres.
Parfois qualifié de « laboratoire de journalisme », le Montréal Campus entame cette année une démarche qui n’a rien d’expérimental. Son avancée est assurée, ses visées, limpides : célébrer la pluralité, faire remporter l’égalité.
infographie: LUDOVIC THÉBERGE MONTRÉAL CAMPUS
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