Trouver sa voix face au Plan Nord

C’était hier qu’avait lieu le lancement du livre Les voix politiques des femmes innues face à l’exploitation minière de Catherine Delisle L’Heureux, qui se penche sur la résistance des femmes innues face au Plan Nord et qui dresse un portrait d’une lutte constante et à multiples facettes.  

À la suite des mouvements de mobilisation des femmes autochtones à l’annonce du Plan Nord en 2011, Catherine Delisle L’Heureux s’est lancée dans sa recherche, réalisée dans le cadre d’une maîtrise en anthropologie. Elle souhaitait mettre en lumière l’histoire des femmes innues militant contre l’industrie minière et en illustrer les effets au sein des communautés touchées, au niveau familial et social, à travers des voix de femmes.

Les témoignages anonymes, recueillis dans les régions de Mani-Utenam et Matimekush-Lac John, illustrent le rôle des militantes innues dans les luttes pour le territoire et la transmission de leur culture aux générations futures. Les mots de ces femmes, d’âges divers et touchées de près ou de loin par les effets de l’industrie minière, avancent que la lutte pour la terre est plus qu’une question géographique.

Solange*, l’une d’entre elles, explique que l’apparition des mines sur les territoires autochtones bafoue la nature propre des Innus. « Tu vois où ça a commencé? Ce n’est pas le Plan Nord. C’était enlever l’Innu du bois. Probablement déjà, ils [le gouvernement] disaient s’ils ne sont pas dans leur territoire on va être capable de faire des choses », raconte-t-elle dans le livre.

L’ouvrage témoigne de la résilience des femmes innues, qui depuis des décennies veillent sur leurs terres. Sylvie, une autre femme témoignant dans l’ouvrage, explique sa vision de l’origine du rôle de la femme dans leur communauté. « Je ne sais pas c’est quoi qui guide les femmes. […] Mais la seule chose que je peux te dire c’est que la femme était laissée au camp quand son mari partait une semaine à la chasse au caribou. […] Je me dis que c’est peut-être… qu’on a toujours gardé le rôle de gardienne de camp », peut-on lire.

Les femmes autochtones vues différemment

L’auteure désirait montrer la femme autochtone sous un autre angle que celui généralement projeté dans les médias. « On parle beaucoup des femmes autochtones, mais on les entend très peu se prononcer. […] J’ai voulu souligner qu’elles ne sont pas que des victimes, et qu’elles ont des choses à dire sur les enjeux qui les touchent », affirme-t-elle.

Elle explique que les voix officielles qui représentent l’opposition au Plan Nord ne sont pas représentatives. « Les perspectives qu’on entend par rapport au Plan Nord sont souvent véhiculés à travers les politiques officielles, c’est-à-dire les conseils de bande et sont souvent investis par les hommes autochtones. J’ai donc voulu mettre de l’avant les voix des femmes, qui sont souvent invisibilisées dans les médias », dit-elle.

Et maintenant ?

Malgré le silence qui plane présentement quant à l’avenir du Plan Nord, Catherine Delisle L’Heureux souhaite que les yeux reste tournés vers les femmes innues et leur lutte. « Oui on n’entend pas parler du Plan Nord en ce moment, mais on ne sait pas quand ça peut reprendre cours. […] Dans tous les cas, ils restent du chemin à faire et il faut continuer d’en parler », soutient-elle.

* Noms fictifs, tous les témoignages recueillis dans le livre sont anonymes

photo: FLORIAN CRUZILLE MONTRÉAL CAMPUS

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