Scruter les eaux usées

En 2017, la journée mondiale de l’eau porte sur les eaux usées, les moyens de les réutiliser et de les diminuer. Au Québec, plusieurs universités se spécialisent sur ces enjeux en développant de nouveaux outils pour traiter l’eau et pour mieux comprendre l’impact des eaux usées sur l’environnement.

Selon les statistiques de l’ONU, plus de 80 % des eaux usées par l’activité humaine sont rejetées dans les cours d’eau sans être traitées. Ce sont donc des centaines de chercheurs qui travaillent à étudier la qualité ou le traitement de l’eau ici et à travers la planète. Les chercheurs proviennent de plusieurs domaines comme les sciences de la nature, le génie, la biologie et plus encore. « L’industrie des eaux usées, au niveau mondial, est en ce moment à une période charnière de redéfinition, explique le professeur à la Faculté de génie civil de McGill, Dominic Frigon. L’idée est de redéfinir l’industrie de traitement dans un esprit de récupération des ressources ».

Ce que veut dire le spécialiste, c’est que les chercheurs se rendent compte que les eaux usées peuvent avoir un grand potentiel énergétique. Grâce à de nouvelles techniques de traitement, les eaux usées pourraient être réutilisées, mais elles deviendraient également une source prolifique d’énergie calorifique, d’énergie biochimique et de nutriments. « Par exemple, le phosphate est un minéral que l’on doit extraire de la terre. On commence par contre à voir l’arrivée de la fin de cette ressource, indique M. Frigon. Donc il faudrait peut-être récupérer le phosphate que l’on disperse dans l’environnement finalement ».

Selon lui, l’industrie souhaiterait récupérer également des ressources telles que le carbone, l’azote ou encore de l’énergie pour les transformer. « C’est sûr que c’est une transformation de l’industrie qui va s’opérer sur quelques décennies, mais à la base, toute l’industrie veut se redéfinir dans ce sens-là », ajoute-t-il.

Impact environnemental

À L’UQAM, la recherche sur les problématiques qui touchent l’eau est abordée différemment que chez les ingénieurs. L’objectif est davantage posé sur l’impact de la dispersion des eaux usées dans l’environnement. Les chercheurs de la maison d’enseignement du Quartier Latin souhaitent « pouvoir tracer le devenir des eaux usées quand elles sont déversées dans l’environnement », explique le professeur au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère et directeur des programmes de 2e et 3e cycles en sciences du Globe, Florent Barbecot.

« Je travaille sur le développement d’outils pour permettre d’identifier, par exemple, les sources de phosphore », indique-t-il. Le phosphore est un minéral qui peut conduire à l’eutrophisation* des lacs et des rivières. « On développe des méthodes qui nous permettent d’identifier si le phosphore qu’on trouve dans l’environnement est lié aux eaux usées, à l’épandage d’engrais, des rejets industriels, des choses comme ça.  Nous sommes les seuls à faire ça au Canada », ajoute le professeur.

Entraide entre les universités

La recherche à l’UQAM ne s’arrête pas là. Pour le professeur au Département des sciences biologiques Philippe Juneau, la collaboration représente l’avenir de la recherche dans tous les domaines. Le Groupe de recherche interuniversitaire en limnologie et en environnement aquatique (GRIL), dont il fait partie, est un bon exemple de collaboration.

« C’est un regroupement de chercheurs qui travaille sur tout ce qui se fait au niveau des eaux douces, vulgarise le professeur. On travaille avec d’autres chercheurs sur des projets communs pour déterminer la qualité de l’eau, comment les changements climatiques vont influencer les populations qu’on retrouve dans les cours d’eau au Québec et ailleurs ». Il s’agit donc d’un regroupement de plusieurs universités et centres de recherche au Québec dont les universités de Montréal, Laval, Concordia, McGill, Sherbrooke et bien d’autres. « Il y a 150 étudiants qui travaillent avec nous, des chercheurs postdoctoraux, des professionnels de recherche, des techniciens, se réjouit Philippe Juneau. C’est vraiment la force d’un réseau ».

*L’eutrophisation est l’accumulation de nutriment comme le phosphore dans les cours d’eau, ce qui stimule le développement de plantes aquatiques. Il s’agit du processus naturel très lent, mais qui est accéléré par l’activité humaine, ce qui peut engendrer un déséquilibre des écosystèmes.

Photo: CATHERINE LEGAULT MONTRÉAL CAMPUS

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