Le « système scolaire québécois serait donc moins équitable que ceux des autres provinces canadiennes ». Un constat peu reluisant pour le gouvernement Couillard et ceux qui l’ont précédé. Un constat que j’avais peine à croire lorsque je l’ai lu dans le dernier rapport du Conseil supérieur de l’éducation (CSE) publié en octobre dernier.
En s’attardant aux arguments de cette publication, on ne peut faire autrement qu’en arriver à la conclusion que les écoles du Québec sont les plus inégalitaires au pays.
« Dans tous les domaines évalués par le Programme international pour le suivi des acquis des élèves 2012, la différence de performance entre les élèves des écoles défavorisées et ceux des écoles favorisées est toujours significativement plus importante au Québec que dans les autres provinces ou régions du Canada », peut-on lire dans ledit rapport.
On aime bien se comparer avec les autres Canadiens en se disant qu’on est moins arriérés que dans certaines provinces, que nos valeurs progressistes et notre culture diversifiée nous donnent une petite longueur d’avance. Le problème est qu’on a tendance à penser qu’en matière d’éducation, on se démarque. Il faut croire que notre instinct fait défaut puisque le Québec se trouve tout au bas de l’échelle si on le compare à l’ensemble du pays.
Il serait d’ailleurs simple de pointer du doigt le gouvernement libéral actuel. Il possède sa part du blâme, mais le problème est systémique, ancré depuis plusieurs années, et il ne serait guère sur le point de se régler. « Les données présentées dans ce rapport sur l’état et les besoins de l’éducation indiquent que le Québec est engagé depuis déjà quelques années dans une logique de quasi-marché qui encourage l’essor d’une école à plusieurs vitesses. Dans ce contexte, il risque d’atteindre un point de rupture et de reculer non seulement sur l’équité de son système d’éducation, mais aussi sur son efficacité globale », mentionne-t-on d’ailleurs dans le rapport.
J’ose croire que la situation en éducation n’est pas si catastrophique alors que, selon le texte d’une centaine de pages, la relation entre la performance des élèves et le statut socioéconomique des écoles s’avère mieux, ici, que dans certains pays d’Europe comme la France. On ne peut nier par contre qu’il y a plusieurs hypothèses et faits alarmants dans le rapport du CSE. Un élève inscrit dans une classe ordinaire, malgré toute sa bonne volonté, aurait de 13% à 20% moins de chances d’aller à l’université que ses confrères étudiants dans un programme public enrichi ou dans une école privée. Il existerait présentement un système à trois vitesses : le réseau privé, les programmes particuliers ou enrichis de l’école publique et le programme ordinaire de l’école publique. Et, « ironiquement, les élèves qui n’ont pas accès aux écoles privées ou aux programmes enrichis sont ceux qui auraient le plus à gagner à fréquenter un milieu scolaire plus stimulant, parce qu’ils peuvent moins que les autres compter sur les ressources de leur milieu familial pour enrichir leur bagage culturel. » La multiplication des programmes sélectifs, le libre choix parental – l’approche client – et la culture de concurrence instaurée dès le début de la scolarité obligatoire représentent des facteurs clés favorisant l’injustice sociale à l’intérieur du système éducatif.
Ai-je vécu trop longtemps dans ma tanière pour trouver qu’il y a quelque chose de fondamental qui cloche avec ces faits?
Des faits présentés, non pas par un blogue obscur du fin fond du Web, mais bien par un organisme somme toute crédible qui a pour mission de « conseiller le ministre responsable sur toute question relative à l’éducation » entre autres à l’aide d’un « rapport sur l’état et les besoins de l’éducation ».
Pourtant, leur dernier rapport ne semble pas avoir suscité beaucoup de discussions et de réflexions. Loin de moi l’idée de vouloir m’immiscer dans l’appareil politique, mais il m’apparaît essentiel de tenir un débat public sur les constats du CSE. Tristement, après avoir été questionné par rapport à la publication, le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, a tout simplement balayé les critiques du revers de la main. Mon aversion envers certaines tendances politiques découle peut-être de là en fin de compte.
Le sujet est beaucoup trop important à mes yeux pour qu’on laisse filer une telle chance de s’attaquer à des enjeux préoccupants.
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