Au cinéma, l’efficacité d’un suspense peut résider dans sa simplicité. Un film peut devoir son succès à son intrigue linéaire et conventionnelle ou à la sobriété de sa mise en scène. Quand on se penche sur des thématiques plus psychologiques, telle que la paranoïa, une mise en scène trop austère peut au contraire nuire au propos.
C’est le cas de Rouge sang, premier film réalisé par le cinéaste québécois Martin Doepner, qui s’aventure dans cette profondeur psychologique manifestement difficile à traiter. La thématique de la paranoïa a été exploitée quelques fois avec succès au cinéma, notamment dans The Black Swan de Darren Aronofsky ou encore dans Antichrist de Lars Von Trier. Ces deux œuvres illustraient des portraits créatifs et absolument marquants de cette déviance psychologique. On ne peut pas en dire autant de Rouge sang. Malgré d’indéniables qualités visuelles et d’excellentes prestations d’acteurs, le film de Doepner demeure à mon sens un échec.
Les comédiens qu’il dirige, Isabelle Guérot et Lothaire Bluteau en tête, offrent de très belles performances. Les multiples confrontations entre ces deux acteurs sont définitivement les meilleurs moments du film, même s’ils sont tous de trop courte durée. Heureusement, le jeu de la démence auquel Isabelle Guérot se prête et l’intensification émotive croissante de son interprétation, au fur et à mesure que l’intrigue progresse, captivent jusqu’aux dernières secondes du film.
Cette dernière doit rivaliser avec cinq soldats britanniques qui se sont incrustés de force dans sa demeure, une cabane en bois isolée dans une forêt du Bas-Canada, pour y passer la nuit du 31 décembre 1799. L’histoire n’est cependant qu’un prétexte pour imposer une ambiance à huis clos oppressante et mettre à exécution les rouages d’un violent suspense. La performance de la comédienne Charlotte St-Cyr est aussi à souligner. La jeune actrice insuffle au film une légère dose d’humanité qui contraste habilement avec la violence. Au final, même si la plupart des revirements sont très prévisibles, on ne peut qu’être ébranlé devant la conclusion percutante, en particulier le dernier plan de caméra qui en bouleversera plus d’un.
Rouge sang, Martin Doepner, 93 minutes, à l’affiche depuis le 1er février
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