Collection de livres anciens et rares de l’UQAM
À l’abri du rythme effréné de la vie universitaire, la Collection de livres anciens et rares de l’UQAM préserve avec minutie et patience les témoignages du passé. Peu connue des étudiants, une poignée de mordus oeuvrent pour la dévoiler aux uqamiens.
À l’abri du rythme effréné de la vie universitaire, la Collection de livres anciens et rares de l’UQAM préserve avec minutie et patience les témoignages du passé. Peu connue des étudiants, une poignée de mordus oeuvrent pour la dévoiler aux uqamiens.
Photo Jean-François Hamelin
L’odeur si typique des vieux bouquins assaille les narines en entrant dans la salle dédiée à la Collection des livres anciens et rares de l’UQAM. Cinq siècles de connaissance, de recherche et de littérature occupent les rayons de ces locaux situés légèrement en retrait de la bibliothèque centrale. Une fois la porte de ces lieux refermée, le bruit du monde extérieur devient murmure.
Ici, le temps semble marquer une pause. Guillaume Tremblay, étudiant en histoire à la maîtrise, aime fréquenter ces lieux pour cette raison. «L’espace est assez restreint et le personnel est sympathique. La Collection offre une ambiance propice à la recherche. Nous sommes loin de l’atmosphère de la Grande Bibliothèque, qui est presque un zoo.»
Presque tous les mois, Guillaume Tremblay consulte des documents de la Collection dans le cadre de ses études. «Je trouve ici des récits de voyage du XVIIIe siècle que je ne retrouverais pas dans les bibliothèques conventionnelles ou dans les librairies.» Une mine d’informations qui est essentielle à certains cours spécialisés, affirme la directrice du Département d’études littéraires, Brenda Dunn-Lardeau. «Ça donne l’occasion à nos étudiants de consulter sur place des artéfacts de l’ancienne Europe sans devoir se déplacer.»
Une salle au trésor
Une salle au trésor
Le bibliothécaire de la Collection, Gilles Janson, entretient un rapport particulier avec ces livres dont il semble connaître les moindres secrets. Les documents sont entreposés dans une réserve sous température contrôlée annexe à la salle d’étude. L’endroit a des airs de labyrinthe avec ses innombrables rangées et ses milliers de livres à la reliure de cuir et au papier jauni qui s’empilent sur les rayons. Sans hésiter, le gardien du trésor parvient à retrouver quelques perles qui font l’orgueil de la Collection, notamment un manuel de géographie, Cosmographi geographica, qui remonte à 1482, une édition de 1613 des Voyages de Champlain, une version originale de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert ainsi que les Œuvres complètes de Voltaire, datant de 1783. Finalement, Gilles Janson présente l’Anticoton, son chouchou. Ce pamphlet, qui tient dans une main, a été rédigé en 1610. Il accuse l’ordre jésuite d’être coupable du meurtre d’Henri IV. Sous ordre du roi, presque toutes les copies ont été brûlées en France et dans les colonies. «Il n’en reste que quelques exemplaires dans le monde et nous en avons un», confie tout sourire celui qui tire sa révérence après 35 ans de service à l’UQAM.
Le public peut consulter à la Collection plus de cinquante mille documents, dont plusieurs sur l’histoire canadienne et sur la littérature québécoise. Le chiffre impressionne compte tenu du jeune âge de l’Université. «En fait, elle est issue des fonds du Collège Sainte-Marie et de l’École normale Jacques-Cartier, deux des quatre écoles qui ont ″fusionné″ pour devenir l’UQAM en 1969», explique Gilles Janson. À l’époque de sa fondation en 1856, les trois directeurs de l’École Jacques-Cartier, de fervents bibliophiles, ont acquis plusieurs ouvrages d’ici, d’Europe et des États-Unis.
Collectionner, c’est choisir
Disposant d’un maigre budget annuel de 8 000 dollars pour de nouvelles acquisitions, le bibliothécaire doit compter sur la générosité des particuliers pour développer la Collection, comme les sœurs de la Congrégation de Notre-Dame. «Pourquoi ont-elles pensé à nous? Peut-être parce que nous sommes pauvres! Elles m’ont montré un fonds de 80 000 livres et m’ont demandé de choisir ce que je voulais. J’ai dû en sélectionner 3 500, faute de place.» Le manque d’espace à la Collection cause constamment des maux de tête à Gilles Janson. Un bureau a été détruit pour agrandir la surface d’entreposage, mais, selon lui, ce n’est pas suffisant. «L’Université avait promis de déménager la bibliothèque dans l’édifice Saint-Sulpice [acquis en 2005 par l’UQAM et revendu deux ans plus tard] puis dans l’îlot Voyageur. Je me suis emballé trop vite.»
Des livres pour tous
Peu d’étudiants connaissent l’existence de la Collection. Pour la présenter au grand public, la bibliothèque centrale de l’UQAM accueille en ce moment l’exposition De la Renaissance à la Révolution: aux sources de la Modernité. L’évènement célèbre les grandes figures intellectuelles de ces époques à travers des documents anciens, provenant principalement de l’Université. Il s’agit de la troisième exposition pour la Collection en 40 ans d’existence. Comment expliquer cette lenteur? «Étant donné l’étendue des sujets couverts par la bibliothèque des livres rares, c’était très complexe de monter une exposition puisque nous n’avions pas les experts nécessaires», répond Brenda Dunn-Lardeau qui est aussi la commissaire invitée de Présence de Champlain, un événement présenté dans la salle d’études de la bibliothèque des livres rares et anciens qui met en valeur les documents relatifs au fondateur de Québec. La directrice du Département d’études littéraires ainsi qu’une poignée de chercheurs constituée de spécialistes en histoire, en littérature et en conservation des documents souhaitent rendre accessible la Collection au plus grand nombre grâce aux expositions. «La belle au bois dormant s’est réveillée», annonce-t-elle.
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