Apapacho : une ode à la mort qui caresse l’âme vivante

Le film canado-mexicain réalisé par Marquise Lepage, Apapacho, une caresse pour l’âme, raconte l’histoire du deuil de deux sœurs engendré par le décès de leur cadette. Grâce à la culture mexicaine et à la traditionnelle fête des Morts, les personnages parviennent à modifier leur vision de la mort, et ils entraînent inévitablement le public avec eux. 

L’action se déroule majoritairement au Mexique, où deux femmes, Karine (Laurence Leboeuf) et Estelle (Fanny Mallette) voyagent à la suite du décès de leur sœur Lili (Eugénie Beaudry). Une fois arrivées dans la région montagneuse de Cuicatlán, située au sud-ouest de Mexico, elles seront accueillies par Jorge (Arturo Rio) et Rosa (Sofia Espinosa) originaires du Mexique qui perçoivent la mort bien différemment. 

Le jeu des acteurs et des actrices est impeccable, et celui des Québécoises est d’autant plus admirable considérant l’adaptation nécessaire pour jouer dans un autre pays et dans une langue étrangère. Fanny Mallette reconnaît cette difficulté supplémentaire, mais explique que « [son] personnage était dépaysé, donc [elle s’en] est servi ».

Ayant elle-même expérimenté la fête des Morts au Mexique alors qu’elle traversait une période de deuil, la réalisatrice, Marquise Lepage, s’est inspirée de son propre vécu pour son cinquième long-métrage. Tout comme les personnages, elle a été confrontée à ces festivités par hasard, et cela l’a immédiatement aidée à cheminer à travers la peine qu’elle vivait à ce moment. « Ça m’a beaucoup inspiré et j’ai eu la petite étincelle pour commencer quelque chose, commencer à écrire un scénario, et quatre ans plus tard ça a fait un film », exprime-t-elle. 

La mort sous un autre angle

Le véritable exploit du film est d’avoir su aborder la douleur engendrée par la perte d’un être cher avec une légèreté et une douceur inouïe, et cela a été possible grâce aux rituels mexicains, affirment la réalisatrice et l’actrice principale, Fanny Mallette. Dans ce pays, « il y a quelque chose de moins hypocrite dans l’accueil de la mort et de la douleur […] on ne cache pas qu’on a de la peine […] et c’est chargé d’amour », explique Fanny Mallette, visiblement marquée par sa visite au Mexique. 

Le travail était colossal considérant que l’oeuvre s’attaque au suicide, « la mort la plus tabou », selon la réalisatrice. Elle a toutefois su en parler naturellement et en toute délicatesse dû à son propre vécu auprès de gens qui se sont enlevés la vie. Le film traite de la mort sans lourdeur et à l’aborder tel quel : « C’est aussi simple et aussi compliqué que ça », confie le personnage de Lili, touché par la maladie mentale, dans son message d’au revoir à ses soeurs. En une phrase, la jeune femme résume bien ce que le film illustre en 90 minutes. « Le sous-sujet, c’est : arrêtons d’avoir honte de ça », raconte la réalisatrice.

Où l’art et les cultures se rencontrent

Produit avec un budget de 2 millions, dont 1,5 million est d’une contribution canadienne, le film a été tourné au Mexique durant 18 jours. La plupart des images sont d’ailleurs originales puisque l’équipe y a voyagé durant la période de la fête des Morts : les lieux que l’on voit dans l’oeuvre sont tels qu’ils ont été ornés par le peuple mexicain. Les milieux sont colorés, égayés par des bouquets de cempasúchil, aussi appelé rose d’Inde, ces fleurs orange qui se retrouvent sur la quasi-totalité des autels mexicains.   

En ce qui concerne la trame musicale, ce sont des mélodies traditionnelles mexicaines qui nous transportent d’une scène à l’autre avec une légèreté et une énergie contrastant avec la mort. Ces éléments contribuent à la fluidité du film, qu’on sent naturel et qui fait oublier les différences de culture, permettant aux spectateurs et aux spectatrices de s’adapter au même rythme que les personnages. 

Le long-métrage, globalement excellent, laisse le public sur une soif d’émotion. Une telle oeuvre fait croire qu’elle viendra toucher et émouvoir, mais elle le fait d’une manière bien différente de ce à quoi le public québécois est habitué. Ce ne sont pas des larmes, mais bien un apaisement qui se manifeste pour quiconque regarde le film, qui se veut une caresse pour l’âme. Apapacho a donc accompli son mandat. 

Apapacho, une caresse pour l’âme, des Productions du Cerf-Volant, sortira en salle le 18 octobre.  

PHOTO FOURNIE PAR LES PRODUCTIONS CERF-VOLANT



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