Faire semblant de vivre. Voilà ce que révèlent le comportement malaisé, les échanges creux et les gestes calculés qui caractérisent La Ville, pièce du Britannique Martin Crimp. L’œuvre met en scène Clair, s’inventant une vie au fil de ses écrits, et son mari Chris, chômeur désœuvré et maladroit. Le texte dépeint la vacuité qui hante ces deux personnages. Sa sobriété renvoie parfaitement à la monotonie et à l’ennui de leur existence.
Tout, dans la pièce, est froid, lointain, distant de la réalité. Il est remarquable que des personnages parlant sans vraiment s’écouter et répétant sans cesse les mêmes phrases puissent susciter une réaction chez le spectateur. Peut-être se reconnaît-il dans cette histoire pourtant perturbante d’authenticité…
La Ville est une pièce à texte, une succession de moments. Rechercher une vue d’ensemble reste assez ardu, et peut-être même inutile. La pièce s’apprécie par ses tirades, ses envolées verbales et ses longs monologues surprenants de retenue. La signification de l’histoire, elle, présente moins d’intérêt.
Sophie Cadieux, d’ordinaire flamboyante, rend une performance toute en nuance et Alexis Martin inspire une réelle pitié. Évelyne Rompré, en voisine infirmière insomniaque, vient mettre du piquant dans un déroulement contrôlé et figé.
La mise en scène, signée Denis Marleau et Stéphanie Jasmin, sert très bien le propos du texte par sa discrétion et son harmonieuse simplicité. Par contre, la projection de l’image d’un des personnages est discutable, car elle brise le rythme et embrouille l’intrigue plutôt que de la clarifier.
Voilà un texte perturbant de réalisme, interprété par des acteurs au jeu distant et débordant d’irréalisme, qui nous touche par ses contrastes entre mots et émotions.
La Ville, Martin Crimp, jusqu’au 22 février, Espace Go, mise en scène de Denis Marleau et Stéphanie Jasmin
Crédit photo: Leda / St-Jacques
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