Alice Jarry soulève la poussière

L’art et la science fusionnent au Cœur des sciences de l’UQAM, où se déroule actuellement l’exposition Dust Agitator Serie de l’artiste Alice Jarry. Ses trois œuvres, qui proposent un amalgame entre le matériel brut et l’art numérique, véhiculent des enjeux environnementaux issus d’un processus entre la transformation du verre et l’utilisation des technologies infrastructurelles.

C’est dans une salle au décor épuré que sont disposés sable, fragments de verre recyclé ainsi que poussière afin de créer une exposition minimaliste. Avec une simplicité brute, une précision et un souci du détail, Dust Agitator Serie pose un regard sur différents enjeux présents dans le monde de la gestion des matériaux dans l’industrie de la construction. Ces réalités, surtout sociales et environnementales, vont de la pollution à la sédimentation de la poussière résiduelle de verre en plus de démontrer leur impact sur l’environnement et sur la santé.

La maquette topographique Dust Silica, représentant des dunes de sable et accompagnée d’un écran sur lequel défilent des photos satellites de ces dunes, évoque le problème de l’exploitation massive du sable en Amérique du Nord. « Le sable est une ressource limitée et fragile. Il risque d’y avoir une pénurie de sable à long terme sur la terre, parce que c’est la troisième ressource la plus utilisée après l’or et l’eau », explique l’artiste, aussi doctorante en études et pratiques des arts à l’UQAM.

Un peu plus loin siège l’œuvre Dust Agitator, qui représente la poussière résiduelle du verre utilisé dans l’industrie de la construction, créant ainsi de la pollution atmosphérique.

C’est en mélangeant de la matière brute, telle que la poussière de verre ou du sable, ainsi que du matériel technologique comme des lumières DEL, que l’œuvre permet de sensibiliser le public à ces enjeux écologiques.

Art et science : une combinaison gagnante

C’est une exposition qui suscite beaucoup de réactions concernant le mariage entre l’art et la science, considère Alice Jarry. « La pratique de laboratoire a des similitudes avec la pratique artistique dans le sens de l’expérimentation, même si [les intentions] sont différentes », souligne-t-elle.

Le professeur en arts visuels et médiatiques à l’UQAM et codirecteur de supervision du doctorat de l’artiste, Jean Dubois, est du même avis. « Ici, l’artiste en question travaille l’image et les systèmes [numériques] pour représenter des œuvres qui sont fortement inspirées par les mêmes principes utilisés en sciences », explique-t-il. L’art numérique devient ainsi un intermédiaire permettant la transmission de savoir entre ces deux disciplines, ajoute-t-il. À l’aide des trois œuvres, le public tend à assimiler les enjeux environnementaux de façon plus intuitive.

L’art de l’interdisciplinarité

Le vernissage du 12 septembre clôturait d’ailleurs un sommet de l’organisation KHEOPS, un consortium international de recherche sur la gouvernance des grands projets d’infrastructure. « [On] a pour mission d’évaluer la possibilité d’innover dans nos recherches pour élargir les préoccupations sociales dans notre gouvernance des grands projets d’infrastructure en unissant les forces de plusieurs domaines, connexes ou non », explique la directrice exécutive de KHEOPS, Nathalie Drouin.

« Je trouve ça absolument fascinant de prendre des œuvres, qui vont normalement dans des galeries ou des musées, puis de les exposer dans un autre réseau, explique Alice Jarry. [Je veux] les amener dans un univers assez différent du mien et qui n’utilise pas nécessairement l’art ni la recherche-création pour réfléchir ou comme mode d’action. »

Une collaboration hors du commun

Le but premier de cette exposition est de proposer un projet qui met en œuvre des collaborations intersectorielles. Conjuguer des domaines tels que la recherche, la créativité ou la gestion permet de faire réfléchir les gens à propos des avantages de la multidisciplinarité avec une approche innovante, selon Mme Drouin.

« Ce que Alice nous a présenté […] permet d’apporter des démarches différentes et de pousser la réflexion beaucoup plus loin et c’est ça la vraie valeur de l’approche multidisciplinaire », souligne-t-elle. Elle ajoute que l’exposition représente le genre de projet que le consortium tend à mettre sur pied afin d’encourager le partage des connaissances entre différents secteurs industriels.

L’exposition Dust Agitator Serie se déroule au Cœur des Sciences de l’UQAM jusqu’au 15 septembre 2018.

photo: LUCIE FORTIN MONTRÉAL CAMPUS

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