Les notes de cours partagées en ligne, un nouveau type de plagiat ?

À l’heure de l’instantanéité et des mégadonnées sur Internet, les étudiants et étudiantes ont accès à un vaste répertoire de notes de cours, résumés d’étude et questions d’examens sur des sites en ligne. Ce phénomène constitue un casse-tête pour les universités, qui doivent faire face à cette nouvelle réalité.

Plus de 11 000 universités, 5 millions d’utilisateurs et d’utilisatrices et 790 000 questions d’examens : c’est ce que regroupe le site de partage de documents académiques StuDocu, fondé en 2013 par Marnix Broer et trois de ses amis.

L’année dernière, Julie*, étudiante en science politique à l’UQAM, a déposé des projets de recherche et des notes de cours sur StuDocu. « Ça m’intéressait, car il y avait des notes concernant des cours que je comptais prendre. Du coup, je me suis dit “pourquoi ne pas mettre mes travaux également ?” », souligne-t-elle.

Présentement, 80 % des documents sont accessibles gratuitement sur la plateforme. « Notre mission est de permettre à chacun d’exceller en fournissant les meilleurs outils pour étudier », peut-on lire sur le site web.  

Pour accéder à toutes les ressources du site web pendant 14 jours, l’étudiant ou l’étudiante se doit de partager un fichier sur la plateforme. Cependant, les internautes qui n’oseront pas mettre leur contenu en ligne se verront facturé(e)s mensuellement 5,99 $. Tous les utilisateurs et utilisatrices se basent sur des travaux mis en ligne par des internautes inconnu(e)s et dont la fiabilité n’est pas absolue.

« Nous utilisons notre communauté pour non seulement partager des connaissances, mais également pour évaluer et examiner les documents [mis en ligne]. Chaque utilisateur peut [leur attribuer une note]. Grâce aux informations générées, nous savons comment servir les meilleurs documents de qualité », explique le président de StuDocu, Marnix Broer, en entrevue au Montréal Campus.

Des actions lourdes de conséquences

Pour Julie, le partage de ses documents avait pour but d’aider les autres. « La majeure partie des documents que j’ai mis en ligne étaient pour des cours de première année. Les étudiants, quand ils arrivent, ils n’ont pas de repère. Du coup, je me suis dit que c’était un apport [pour eux] », explique-t-elle.

Elle avoue que ce n’est pas sans inquiétude qu’elle a déposé des travaux signés par son nom complet. C’est après avoir vu des documents de cours de l’Université de Montréal signés par des étudiants et étudiantes qu’elle s’est sentie en confiance pour le faire également.

Il n’existe pas de sanction prédéterminée dans le règlement 18 en lien avec les infractions de nature académique pour cette pratique. Cependant, la mise en ligne de documents liés à des cours de l’UQAM n’est pas une action prise à la légère, selon le coordonnateur du service de soutien académique, Marc-Olivier Desbiens. L’achat d’un travail, la mise en vente ou la mise en disponibilité d’un travail sur un site de partage de travaux est une infraction aux sanctions plus sévères que le plagiat conventionnel, selon le règlement 18.

« On n’a pas le même degré de gravité au niveau de l’action, car c’est une action extrêmement volontaire de mettre un travail en vente ou d’en acheter un. C’est sanctionné de manière plus importante », affirme M. Desbiens.

Même si les infractions de cette nature demeurent rares, M. Desbiens indique que c’est souvent le corps professoral qui découvre le pot aux roses, et parfois même les collègues de classe. « Lorsqu’ils voient que certains font ce type d’acte, ça les horripile, donc ils viennent le déclarer. C’est effectivement frustrant, mais aussi illégal. Il y a des questions de droit d’auteur dans tout ça, poursuit-il. Il pourrait aussi y avoir des actions légales entreprises par d’autres étudiants. »

S’adapter aux nouvelles réalités

Pour sa part, Marnix Broer croit au contraire que certaines universités doivent s’habituer au fait qu’Internet apporte de nombreuses sources d’informations ouvertes. Elles finissent toutes par constater que c’est dans l’intérêt de tous et de toutes, y compris du corps professoral, selon M. Broer.

« De nos jours, des groupes Facebook, des boîtes de dépôt et des groupes WhatsApp privés et cachés sont utilisés [pour partager des travaux et des notes de cours]. StuDocu est simplement une autre façon de partager ces documents, sauf que nous sommes ouverts et accessibles à tous », affirme M. Broer.

Selon lui, en ouvrant ces informations à tout le monde, les enseignants et les enseignantes peuvent également voir ce qui est disponible à la communauté étudiante, afin de créer de nouvelles questions pour tester leurs connaissances à partir des questions déjà mises en ligne.

« Certaines universités ont demandé de supprimer certains documents de StuDocu auparavant. Nous commençons une conversation avec l’université en question et discutons de ce qui est juste pour l’éducation et les étudiants », explique le cofondateur de StuDocu.

*Le nom de l’étudiante a été changé pour éviter quelconques représailles.

photo: MONTRÉAL CAMPUS

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *