« Devoir de débattre » : les relations entre professeurs et étudiants au coeur des échanges

Les relations intimes entre professeurs et étudiants ont monopolisé une grande partie de la discussion sur les violences sexuelles sur les campus, à l’occasion de l’événement Le Devoir de débattre, hier soir, à la salle Marie-Gérin-Lajoie de l’UQAM.

Si les six panélistes participants à la table ronde Violences à caractère sexuel sur les campus : la loi 151 va-t-elle assez loin? n’ont pas réussi à s’entendre sur une solution à cet enjeu, ils ont souligné qu’il devait absolument être abordé plus en profondeur dans l’application de la loi 151.

Adoptée en décembre dernier à l’Assemblée nationale, la loi 151 indique que les établissements d’enseignement supérieur doivent adopter avant septembre 2019 une politique visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel au sein des établissements d’enseignement supérieur. Elle ne comprend toutefois pas de clause précise quant à l’encadrement relié aux relations intimes ou amoureuses entre les enseignants et les étudiants. La responsabilité incombe donc aux institutions de décider comment encadrer ces relations.

« Il y a des réalités diversifiées d’université à université, en plus de toutes les autres institutions. Il faut aussi respecter la Charte des droits et des libertés », explique la sous-ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Sylvie Barcelo. Toutefois, « la loi n’interdit pas d’interdire les relations entre professeurs et étudiants », précise-t-elle.

L’interdiction de relations intimes entre toute personne ayant une influence sur le cheminement scolaire d’un étudiant et ce dernier est une solution préconisée parmi les acteurs des milieux politique et scolaire afin de détruire les rapports de pouvoir. « Les rapports d’autorité dans les relations intimes peuvent survenir dans les relations amoureuses entre un prof et une élève. Ça crée des contextes de dérapages parce qu’il n’y a pas de limites claires », déplore la cofondatrice du mouvement Québec contre les violences sexuelles, Mélanie Lemay. « Il ne peut pas y avoir de consentement éclairé », ajoute-t-elle.

Même son de cloche pour la professeure au Département des sciences juridiques de l’UQAM et directrice de l’Institut de recherches et d’études féministes, Rachel Gagnon. « C’est certain que le consentement donné dans une relation à l’intérieur de laquelle il y a des rapports d’inégalité de pouvoir est un consentement problématique », déclare-t-elle.

Afin de mieux cerner ce genre situation, les institutions doivent reconnaître que les rapports d’autorité constituent un enjeu important. « Il y a un gros changement de culture à faire par rapport à ça, un changement de mentalité à opérer », insiste-t-elle.

Alors que plusieurs associations étudiantes universitaires demandent l’interdiction des relations intimes entre enseignants et étudiants, les panélistes expliquent que ce sont les professeurs et les directions qui manifestent le plus de réticence à aller de l’avant. « Il y a déjà des codes de conduite mis en place », indique le directeur de HEC Montréal et président du Bureau de coopération interuniversitaire, Michel Patry. « Je ne crois pas qu’il y aura une grande variance dans ce qui sera adopté », renchérit-il, avant de revenir sur ses propos et de signifier qu’il y a un consensus au sein des professeurs pour interdire ce genre de relations.

L’événement organisé par le journal Le Devoir a suscité plusieurs autres questionnements quant à la portée de la loi 151, mais les intervenants demeurent positifs. « C’est un premier pas très important , stipule la sous-ministre Sylvie Barcelo. On se donne la permission de se réajuster. »

 

photo : SANDRINE GAGNÉ-ACOULON MONTRÉAL CAMPUS

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