Une animalerie pour la recherche à l’UQAM

Un centre de recherche sur les maladies rares effectuant des tests sur les animaux se trouve entre les murs du pavillon des Sciences biologiques de l’UQAM. Les tests animaliers menés sous haute surveillance font avancer la science, mais soulèvent  certains questionnements éthiques.

Des hamsters, des souris, des rats, des cochons d’Inde, des poissons et de petits oiseaux, c’est ce qui se trouve dans les locaux de l’animalerie de l’UQAM. Le port d’un sarrau et d’un masque est obligatoire pour passer les portes closes. Derrière elles, au sous-sol du pavillon des Sciences biologiques, on retrouve, dans plusieurs locaux, des bibliothèques remplies de cages.

« Le but est de comprendre les mécanismes d’une maladie afin d’éventuellement développer des thérapies , affirme le technicien en santé animale Normand Lapierre. La recherche qu’on y fait est surtout “fondamentale”. » À l’UQAM, les chercheurs travaillent principalement sur des maladies génétiques rares. « Avant de savoir comment la traiter, il faut savoir comment la maladie se comporte », informe la vétérinaire et directrice de l’animalerie, Manon St-Germain. Les tests sur les animaux sont cruciaux, puisqu’il est délicat d’observer autrement le développement des maladies rares, explique la vétérinaire.

La question des tests en laboratoire « est sans doute la plus difficile » en éthique animale, affirme la doctorante en philosophie et experte en éthique animale Valéry Giroux. « Tout ce qui consiste à infliger de la souffrance à des animaux alors que ce n’est pas nécessaire devrait être interdit », ajoute-t-elle en donnant l’exemple des tests de cosmétiques sur les animaux.

Dans le cas de la recherche biomédicale, le problème devient plus complexe, puisqu’on « pourrait sauver la vie d’êtres humains grâce à ces recherches », affirme la philosophe. Les recherches de ce type ne peuvent pas se passer des animaux, puisque les modèles informatiques ne sont pas encore assez développés pour remplacer ces derniers, explique la doctorante de l’Université de Montréal.

Au regard de l’experte en éthique animale, Mme Giroux, l’utilisation d’animaux n’est pas corollaire de résultats probants.« Il y a tellement peu de recherches qui vont avoir un lien causal entre l’utilisation d’animaux et l’obtention de résultats utiles, décrit l’experte.On ne peut pas dire que c’est une bonne chose, même d’un point de vue scientifique. »

Résultats encourageants

Une équipe de chercheurs de l’UQAM a découvert, en 2016, une diète spéciale qui pourrait aider à ralentir le développement de la maladie de Krabbe, qui affecte le système nerveux central et provoque la mort avant l’âge de cinq ans. Pour faire cette découverte, les chercheurs ont utilisé des souris porteuses de la maladie.

Manon St-Germain, vétérinaire à l’animalerie, se désole du fait que les chercheurs ont de la difficulté à obtenir du financement. L’animalerie de l’UQAM « n’est pas affiliée à un centre hospitalier universitaire », ce qui ne joue pas en sa faveur, renchérit la directrice. Les résultats financiers de 2014-2015 de l’UQAM affichent une injection de 835 000 $ aux services animaliers.

Sous surveillance

Le Conseil canadien de protection des animaux (CCPA) effectue une inspection de l’animalerie tous les trois ans pour assurer un contrôle des lieux. Tout y passe: le bien-être des animaux, la composition du Comité d’éthique, les cages et leur contenu, l’entretien des animaux, la peinture des murs, le plancher, la ventilation et la luminosité. Ces inspections visent à s’assurer que les animaux qu’on y abrite sont traités aussi bien qu’il est possible de le faire.  

Il y a des procédures et des normes à suivre avant d’entamer la recherche. Les projets de recherche doivent être approuvés par le Comité institutionnel de protection des animaux (CIPA), qui fait un suivi et de la formation des chercheurs pour s’assurer que ces derniers manipulent les animaux correctement.

Le personnel du laboratoire nettoie et désinfecte les cages régulièrement; il y place ensuite de la litière et des jouets. « Les souris adorent ça parce que, quand elles ont leurs bébés, ça leur fait une petite place isolée et à l’abri », affirme Manon St-Germain.

D’ailleurs, les scientifiques doivent « s’assurer d’avoir le nombre convenable d’animaux, soit le plus petit groupe possible, de toujours utiliser la forme animale la moins complexe, et d’utiliser les méthodes les plus récentes et les moins invasives », affirme M. Lapierre, technicien en santé animale. La quantité d’animaux est proportionnelle à l’importance de la recherche effectuée, elle doit correspondre aux besoins de celle-ci.

Les avancées réalisées se font tout de même au détriment des animaux qu’on utilise dans le cadre de la recherche, selon Valéry Giroux. Les réflexions sur l’éthique animale contestent la différence entre humains et animaux. « On n’a pas de bonnes raisons de les distinguer, il faudrait qu’on accepte d’appliquer les mêmes règles pour les animaux », croit Valéry Giroux.

photo: Courtoisie de l’animalerie de l’UQAM

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