Ensemble, dénonçons.

Plus d’un étudiant universitaire sur trois — à grande majorité des femmes — a été victime de harcèlement sexuel dans son milieu d’enseignement, rapportait en décembre 2016 l’enquête ESSIMU menée dans six universités québécoises. Des chiffres qui prouvent l’urgence d’agir. Pourtant, une seule victime sur dix dénonce son agresseur auprès des ressources mises à disposition par son université.

Pourquoi? Principalement parce qu’elles ont cru que leur situation n’était pas assez grave, relate cette étude. C’est terrible. Tout comportement sexuel non désiré — qu’il soit verbal ou physique — devrait être condamnable, et ce, sans exception.On ne le rappellera jamais assez : sans oui, c’est non.

Point final.

Selon l’étude, près du tiers des violences sexuelles commises sur les campus sont exercées par une personne détenant un statut supérieur, telle qu’un professeur ou un chargé de cours. Difficile de repousser les avances sexuelles d’un enseignant, sachant pertinemment qu’il a une mainmise sur la réussite scolaire des étudiants. Les universités n’échappent pas aux dynamiques de pouvoir toxiques.

Il est aussi troublant de constater que pour le reste des cas de violences sexuelles, soit 70,2 % des incidents rapportés, il n’existe aucune relation académique ou professionnelle hiérarchique. Dans la majorité des cas d’abus, ce sont des homologues masculins étudiants qui les commettent. Imaginez la difficulté d’une victime à faire face à son agresseur, plusieurs fois par semaine. Ce qui mène à l’abandon de cours et d’une carrière.

On ne peut toutefois pas exiger que toutes les victimes dénoncent leur agresseur.

Porter plainte est un processus extrêmement difficile, tel que le soulignait la membre du comité de révision de la politique 16 de l’UQAM contre le harcèlement sexuel sur le campus Esther Paquette au Montréal Campus.

Par exemple, en vertu de la politique actuelle — en cours de révision depuis plus de trois ans — il est impossible d’obtenir un suivi à la suite du dépôt d’une plainte. Le professeur qui m’a demandé une faveur sexuelle est-il congédié ? Devrai-je suivre l’un de ses cours lors d’une prochaine session ? Vais-je le recroiser dans les corridors de l’UQAM ? Plusieurs questions qui demeurent sans réponses, démontrant l’impuissance de notre institution.

Maintenant que la ministre responsable de l’Enseignement supérieur et de la Condition féminine, Hélène David, a annoncé la mise sur pied du projet de loi 151 visant à éliminer les cas de harcèlements sexuels sur les campus, l’UQAM n’aura bientôt plus le choix d’améliorer sa politique 16, trop longtemps mise de côté au détriment des victimes. L’Université devra sans contredit bâtir une confiance envers elles qui se sentent souvent oubliées dans ce processus épineux. Elle devra leur démontrer qu’elles ne sont pas seules.

Initiatives uqamiennes

C’est d’ailleurs ce que tend à démontrer la communauté uqamienne à ses consoeurs ces dernières semaines. Depuis la vague de dénonciations d’actes sexuels non-consensuels, plusieurs initiatives visant à enrayer le harcèlement sexuel fusent sur le campus.

À la fin de septembre, l’UQAM a notamment mis sur pied un partenariat avec le Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel. Dans cette lignée, l’Université a accueilli dans ses bureaux Annie Girard, une intervenante sociale qui offre des services de soutien téléphonique aux personnes victimes de violences sexuelles et qui désirent porter plainte. Elle présente aussi des ateliers de sensibilisation et de formation.

Pour leur part, les sept associations facultaires ont rappelé à leurs membres qu’elles pouvaient accompagner les victimes dans le processus de dénonciation, en leur offrant de l’aide et du soutien de façon anonyme. Il y a de ces débats sociaux qui dérangent et qui divisent. Les dénonciations d’abus et de violences à caractère sexuel des dernières semaines ne sont pas de ceux-là. Oui, ils bousculent les esprits, mais ils unissent les voix.

L’une des craintes qui animent l’équipe du Montréal Campus est le fait qu’il ne faut pas oublier, et encore moins collectivement banaliser les dénonciations qui sont à venir. Nous ne devons pas nous lasser de ces événements, qui de par leur répétition rendent parfois insensible.

Mobilisons-nous, jusqu’à ce que chaque personne se sente à l’aise d’être qui elle est dans son université. Un changement de mentalité doit assurément s’opérer et nos institutions scolaires doivent incarner ce virage.

En tant que témoins, amis ou collègues, soyons à l’écoute des situations qui nous entourent. Si nous sentons que nous devons réagir, réagissons. Pour toutes ces personnes qui se sentent seules, prouvons-leur le contraire.

 

illustration : VINCENT LAPOINTE 

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