La course aux dons est amorcée à l’UQAM

Alors que les universités québécoises se voient de plus en plus retirer une partie de leurs subventions par le gouvernement, la philanthropie devient une méthode de financement primordiale. À travers ce milieu compétitif, l’UQAM peine à rejoindre sa communauté pour renflouer les coffres.

Pour la directrice générale du développement philanthropique à l’Université de Montréal, Hélène Véronneau, la situation de la philanthropie a pris beaucoup d’importance dans les dernières années. « C’est un monde en mutation. Les hautes directions universitaires se tournent de plus en plus vers leurs fondations et leurs fonds de développement parce que les subventions gouvernementales baissent », explique-t-elle.

Pourtant, l’UQAM ne réagit pas à ce bouleversement. De 2013 à 2016, les dons faits à l’Université ont stagné. Entre les années scolaires 2014-15 et 2015-16, les dons encaissés par la Fondation ont chuté de 6 079 055 $ à 5 651 644 $.

En comparaison, l’Université McGill, dont le programme philanthropique est très reconnu, a touché pas moins de 324 millions de dollars de 2014 à 2016 grâce aux contributions de ses donataires.

L’apport de la communauté universitaire de l’UQAM a également affiché une baisse durant cette période: les dons amassés sont en effet passés de 1 146 385$ en 2014-15 à 846 169$ en 2015-16.

Créer un intérêt

Dans ce milieu où la concurrence est féroce, le directeur général de la Fondation de l’UQAM, Pierre Bélanger, croit qu’il faut avant tout passer par les étudiants pour améliorer la situation.

« On veut leur proposer des choses qui les aident dans leur quotidien, explique M. Bélanger. Mon rêve, c’est que des étudiants viennent nous voir pour faire financer des projets par la Fondation. Il faut que la Fondation soit habitée par la communauté uqamienne et que la communauté se rende compte que la Fondation est là pour eux. »

Le directeur aux fonds annuels et à l’intelligence d’affaires à McGill, Tarek ElChaarani, donne le même son de cloche, précisant qu’une université se doit de démontrer la valeur de la philanthropie à ses étudiants afin de les amener à donner. « À McGill, nous essayons de démontrer l’impact des petits cadeaux sur la collectivité. »

Modèle de réussite

Si l’UQAM peine à attirer des contributeurs, McGill a établi un système de philanthropie efficace. M. ElChaarani rappelle qu’aux fonds de développement de McGill, plusieurs équipes s’affairent à des tâches particulièrement spécialisées, « un peu comme dans une chaîne de montage », ce qui permet un meilleur rendement et une communication primordiale avec les diplômés.

Ceci lui a entre autres permis de récolter pas moins d’un milliard de dollars sur neuf ans, dans une campagne mise en place de 2004 à 2013.

« La chose la plus importante, c’est de demander, relativise M. ElChaarani. Nous avons une équipe importante qui prend la philanthropie très au sérieux, et nous avons une université qui, elle-même, la prend très au sérieux. »

Résultat: l’établissement obtient une grande partie des dons des étudiants ou des diplômés. Selon les observations d’ElChaarani, « McGill se fie sur un plus grand pourcentage d’étudiants et de diplômés que les autres écoles montréalaises [dans le domaine de la philanthropie]. »

Un phénomène culturel?

L’écart financier qu’on peut observer entre McGill et les universités francophones fait partie du débat public depuis plusieurs années déjà. À l’UQAM autant qu’à l’UdeM, on croit que plusieurs facteurs pourraient contribuer à cette divergence philosophique.

« Notre culture reste encore beaucoup à développer, admet Pierre Bélanger. Chez les francophones, par rapport aux anglophones, on remarque que la philanthropie envers [l’université mère] n’est pas toujours évidente. Les Québécois sont généreux, mais ne pensent pas nécessairement à donner de l’argent à leur université. »

Il croit également que la culture philanthropique qui fait la réputation de McGill a dû prendre racine et s’établir à travers les années d’existence de l’université. Celle-ci célébrera son 200e anniversaire en 2021; en comparaison, la Fondation de l’UQAM est née en 1976.

Hélène Véronneau, du Bureau du développement et des relations avec les diplômés (BDRD) de l’Université de Montréal, abonde dans le même sens lorsqu’elle observe le phénomène, rappelant que la communauté francophone a longtemps été très impliquée auprès des paroisses plutôt qu’auprès de leurs institutions scolaires. « Je ne pense pas que cet attachement [des étudiants de McGill à leur université mère] s’est créé de façon spontanée. Ça a été cultivé, et il y a du travail derrière ça. »

Pour Tarek ElChaarani, au contraire, ce phénomène culturel n’est qu’un mythe. Il insiste sur le fait que c’est la méthode utilisée par l’institution d’enseignement qui attirera de nouveaux donateurs. « Il n’y a pas de différence chez les donateurs. Il faut faire le travail nécessaire pour les attirer. »

L’UQAM lancera en janvier une campagne de dons publique dont l’objectif est d’amasser 100 millions de dollars durant les sept prochaines années. Ce projet de grande envergure fait partie des nombreuses étapes entamées au cours des dernières années par la Fondation de l’UQAM pour venir en aide à l’université.

 

photo: SARAH XENOS MONTRÉAL CAMPUS

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