La technologie à la mode de chez nous

Des uniformes transparents aux gilets qui régularisent leur température dans des situations de chaleur ou de froid extrême, en passant par des vêtements dotés d’écrans, les possibilités technologiques du vêtement intelligent semblent infinies. Or, leur aspect esthétique, lui, ne devrait pas connaître une grande révolution. Simplicité, confort et ergonomie demeurent les mots d’ordre de cette tendance vestimentaire émergente.

« Les gens ne veulent pas voir la fonctionnalité de l’item, ses batteries, ses modules électroniques ou ses fils », indique Isabelle Lessard, chargée de projet chez Vestechpro, un centre collégial de transfert en technologie de l’habillement. La jeune femme explique que l’industrie du vêtement intelligent en est à ses débuts côté esthétisme, mais que la tendance n’est pas au look extravagant et robotique comme celui de Lady Gaga, qui restera réservé à la scène dans le futur.

Valérie Lamontagne, fondatrice de 3lectromode, un atelier spécialisé dans la création de vêtements technologiques, insiste sur le fait que le choix de vêtements demeure pratique. Elle observe que les critères du consommateur pour un vêtement intelligent sont les mêmes que pour un morceau ordinaire : la solidité, le confort, la possibilité de laver l’article et de le plier, par exemple.

La jeune entrepreneuse souligne que la mode, comme la technologie, évolue. Si la peur du ridicule empêche le consommateur moyen d’arborer un veston aux mille lumières à l’arrêt d’autobus, des options plus nuancées et purement esthétiques, telles qu’un vêtement comportant des écrans ou changeant de couleur, pourraient être vendues en magasin. « On aimerait peut-être pouvoir transformer son look pendant la journée, si on a, par exemple, un rendez-vous avec la banque et après, un lunch coquin », souligne Valérie Lamontagne.

L’habit et l’humeur 

L’entrepreneuse indique qu’il sera possible plus que jamais de cacher ou de mettre en valeur certains aspects de sa personnalité. Le consommateur aura plus de choix sur les détails de son vêtement, sa luminosité, ce qu’il projette — vidéos ou photos — et le type de matériau dont il est fait. En effet, il sera peut-être un jour possible de porter un chandail de soie en plein hiver grâce à des fibres chauffantes, explique Valérie Lamontagne. Si la haute couture jubile à l’idée d’exploiter les nouvelles extravagances esthétiques rendues possibles grâce au vêtement intelligent, le consommateur moyen aura aussi plus de liberté pour exprimer son individualité et son appartenance à certains groupes ou à certaines tendances.

Isabelle Lessard, optimiste, soutient qu’en 2020, la moitié de la population possédera un ou plusieurs vêtements intelligents. Au-delà de l’esthétisme, les domaines de la santé, de la sécurité et du divertissement sont présentement les priorités dans le développement de cette industrie. « On réfléchit beaucoup à créer des items qui pourraient géolocaliser des gens, faire le suivi de la posture et de la médication. D’autres donneraient des alertes de cellulaire directement sur la surface du tissu », signale la chargée de projet.

Elle cite en exemple la veste pour personnes sourdes mise au point par la compagnie londonienne CuteCircuit. Le morceau, réalisé grâce à une étude sur la réaction du corps aux différents sons, permet à son utilisateur de ressentir les vibrations de la musique à travers le vêtement.

Vêtements « branchés »

Les vêtements technologiques présentement sur le marché ne sont pas le résultat d’une rencontre organique et naturelle avec le tissu, selon Valérie Lamontagne. « On ajoute des senseurs aux vêtements, c’est comme si je collais mon cellulaire à ma poche », précise-t-elle. Ces senseurs permettent entre autres de capter les mouvements, la chaleur, le rythme cardiaque. Il est ensuite possible de visualiser les informations obtenues grâce à son cellulaire ou son ordinateur. Les vêtements intelligents disponibles aujourd’hui servent surtout à remplacer des accessoires sportifs, comme les montres et les bandes à la poitrine.

Confiante, la jeune entrepreneuse est convaincue que le futur permettra de programmer les fibres ou d’installer la technologie à la base même du textile. Selon Isabelle Lessard, le vêtement intelligent ne sera jamais vendu comme un vêtement du commerce au détail. Il restera un produit de qualité dont le prix gravitera autour de 75 dollars, alors qu’il avoisine présentement les 200 dollars. Valérie Lamontagne peint deux scénarios possibles pour le futur : « soit on va posséder deux paires de souliers intelligents qu’on aime beaucoup, soit la technologie va tellement baisser de prix qu’on va en posséder 10 ainsi que 10 cellulaires. » Elle croit plutôt à la première option et pense qu’il va falloir changer notre relation avec nos vêtements. Plus intime, à l’image du lien qu’on entretient avec son ordinateur, celle-ci impliquerait qu’on puisse garder une paire de chaussettes pendant quatre ans, voire plus, illustre-t-elle.

 

Photo: SANDRA LYNN BÉLANGER 
Le morceau « Asymetrical Modern 001 » de 3lectromode est serti de diodes électroluminescentes. 

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