Le diable est dans les détails

La National Collegiate Athletic Association (NCAA) doit souffler un peu après un mois de mars chargé alors que le March Madness, le plus prestigieux tournoi de basketball universitaire, vient de se conclure.

Ce championnat a de quoi impressionner. Deuxième événement sportif le plus regardé aux États-Unis après le Superbowl, il met aux prises une soixantaine d’équipes composées de jeunes hommes qui brillent sous les feux de la rampe. Les joueuses de basketball, elles, restent dans l’ombre, car — comme c’est trop souvent le cas dans le sport — le pendant masculin attire toute l’attention lors de cette compétition éliminatoire.

C’est déroutant de constater à quel point ce tournoi est un train roulant à toute vitesse. Les partisans s’y accrochent comme si leur vie en dépendait. On met alors de côté, le temps des vingt et un jours de compétition, les problèmes que vivent les athlètes-étudiants. On semble oublier qu’au final, la NCAA n’est qu’une grosse machine à dollars qui a comme but premier le profit.

On considère que les athlètes, même s’ils travaillent très fort, ont accès à certains privilèges indéniables comme par exemple une bourse qui devrait couvrir en totalité les frais d’études, le logement, la nourriture ainsi que les coûts reliés aux entraînements et aux compétitions.

Inutile, donc, d’avoir un emploi rémunéré, vous me direz, considérant qu’une majorité de ces athlètes dédient près de 70 heures à leurs études et à leur sport. Certains doivent pourtant le faire puisque environ 85% de ces étudiants vivent en deçà du seuil de pauvreté. Ceux qui obtiennent une bourse complète doivent malgré tout dépenser en moyenne 3200 dollars de leurs poches par an, selon des données recueillies par l’Association nationale des joueurs universitaires et par le Département de gestion des sports de l’Université Drexel pour l’année scolaire 2010-2011.

Vivre toutes les difficultés reliées à la pratique d’un sport de haut niveau peut s’avérer en soi assez difficile. Un athlète doit ressentir une dose encore plus imposante de stress en sachant qu’il ne possède pas suffisamment d’argent pour manger à sa faim. L’impression généralisée veut pourtant que les athlètes de la NCAA sont invulnérables et choyés par des passe-droits, mais certains éprouvent les mêmes difficultés que tout étudiant québécois avec des préoccupations financières.  

Pourquoi une industrie qui génère des milliards de dollars ne paie pas les personnes à la base même de ses revenus? Certains ex-athlètes comme l’ancien joueur de soccer de l’Université de Clemson Martin Jenkins — qui a entrepris une action collective contre la NCAA — se battent pour changer leur statut de sportif « amateur » qui les contraint à ne recevoir aucune redevance pour leurs performances et leur implication au sein de l’équipe.  

Mais malgré toutes ces critiques et malgré mon impression que le circuit universitaire américain priorise ses intérêts économiques, je ne peux tout de même pas me ranger du côté de ceux qui affirment que la NCAA — ou que toute ligue professionnelle — représente seulement un divertissement offert par des associations ou des entreprises privées.

Les relations figées dans le temps et les étincelles créées par le sport m’empêchent de boycotter complètement ce genre d’événements. Voir l’entraîneur de l’Université de la Caroline du Sud pleurer en parlant de ses joueurs et des partisans de l’équipe me laisse bouche bée. Regarder le meneur de jeu des Gators de l’Université de la Floride, Chris Chiozza, enfiler le panier de trois points victorieux en temps supplémentaire contre les Badgers de l’Université du Wisconsin m’a donné des frissons.

Peut-être que le sport apporte cette magie qui nous emporte, le temps d’oublier le reste quelques heures. Le March Madness, tout comme plein d’autres compétitions sportives, a le mérite de provoquer des émotions bien particulières pour beaucoup de gens qui se disent peu sentimentaux. Il ne faut simplement pas oublier que la féérie du moment peut cacher son lot de démons.

 

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