Parité malmenée à la tête de l’UQAM

Le nombre de rectrices au Québec est passé d’une pour dix-neuf recteurs en 1993 à quatre pour quinze recteurs en 2016. Au total, 72 % des postes de direction des universités sont occupés par des hommes, selon les données les plus récentes. « Quand on regarde les chiffres dans un contexte de parité, la croissance des postes par genre est insuffisante, c’est trop lent. À ce rythme, on peut espérer, si tout va pour le mieux, une équité homme-femme d’ici 2045 », avance Émanuelle Maltais, finissante au baccalauréat en science politique à l’Université Laval et assistante de recherche au Comité de financement des universités (CFU).

Du côté de l’UQAM, aucune femme n’a été en poste depuis le passage de Danielle Laberge, nommée rectrice par intérim de 2006 à 2008 après le départ de Roch Denis. Elle avait alors dû assumer également les postes de vice-rectrice à la vie académique et de vice-rectrice exécutive. La seule rectrice qui a officiellement été élue à la tête de l’UQAM était Paule Leduc, de 1996 à 2000. Elle avait alors été préférée à Florence Junca Adenot, avec 58 % des voix. Rappelons qu’à l’époque, le conseil d’administration (CA) de l’Université était présidé par une femme, Jocelyne Pelchat, et que Pauline Marois était ministre de l’Éducation sous le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard.

Plusieurs raisons expliquent cette sous-représentation des femmes, selon la directrice de l’Institut de recherches et d‘études féministes (IREF), Rachel Chagnon. « Ceux qui ont le pouvoir de faire monter les gens, ce sont bien souvent des hommes et ils ont une tendance naturelle à tendre la main pour aider les jeunes hommes puisqu’ils se projettent plus facilement en eux, alors que dans leurs expériences avec les femmes, c’est qu’elles sont là pour les aider », remarque-t-elle.

Mme Chagnon précise que, souvent, les postes plus hauts dans les échelons des directions universitaires sont désignés par des processus de cooptation; « C’est un groupe qui choisit les membres à venir du groupe ». Une façon de faire qu’elle qualifie de « normale » dans la mesure où ces membres sont censés sélectionner des personnes compétentes. Le seul hic : « Différentes études en management démontrent qu’on a tendance à trouver que les gens qui nous ressemblent sont plus compétents que les autres. Alors, quand les postes de hautes directions sont essentiellement occupés par des hommes, les personnes qui vont être cooptées vont être plus facilement des hommes », explique-t-elle.

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De son côté, Émanuelle Maltais ajoute que « lorsqu’on regarde les chiffres, on peut voir que pour chaque femme engagée, il y a eu un homme engagé aussi. Le nombre de femmes a augmenté, mais le nombre de postes aussi, donc c’est plus dur d’atteindre la parité à ce moment-là ».

S’il y a peu de femmes dans les postes de rectorat ou de vice-rectorat à l’UQAM, Rachel Chagnon mentionne qu’elles sont tout de même plus nombreuses dans les postes de décanat ou de direction de programme, « qui sont des postes où il y a moins d’enjeux de pouvoirs ». Or, 72 % des postes de rectorat sont occupés par des hommes, en partie « parce qu’ils ont plus tendance que les femmes à s’estimer capables de le faire ».

La directrice de l’IREF conclut en mentionnant que tant que les équipes de directions ne seront pas préoccupées activement par l’enjeu d’égalité, les choses ne s’amélioreront pas. Cependant, elle croit tout de même qu’il y a un niveau non négligeable de conscientisation à l’UQAM concernant l’embauche des professeurs et de la façon dont on traite les étudiantes à l’opposé des les étudiants.

Photo: ALEXIS BOULIANNE MONTRÉAL CAMPUS
Illustration: AUDREY MALO COLLABORATION SPÉCIALE

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