Je me révolte, donc nous sommes

Réunis pour débattre du rôle du citoyen dans les luttes environnementales, quatre experts de l’écocitoyenneté ont entrepris un plaidoyer pour l’engagement social dans une salle bondée de l’UQAM, jeudi soir.

L’engagement se présente dans un contexte difficile, celui de individualisme social tel que mentionné par Laure Waridel, directrice d’un centre de recherche sur le développement durable à l’École polytechnique (CIRROD). Mme Waridel a tout de même précisé qu’il était possible de faire changer les choses par «une multiplication des gestes et des discussions sur les enjeux présents».

Le directeur général pour la Fondation David Suzuki au Québec, Karel Mayrand, a enchaîné en soulignant le climat général d’apathie et d’impuissance. Une entrée en matière pessimiste qui a vite été sublimée par un discours rassembleur. M.Mayrand a mis de l’avant le fort esprit de citoyenneté de la société québécoise en se référant à la citation de David Suzuki qui s’adressait aux Québécois : «Vous avez un esprit tribal!». Une caractéristique importante devant l’incapacité du système politique à toutes formes de rétroaction, a poursuivi M.Mayrand.

C’est cette communion nationale qui devrait être utilisée pour cogiter ensemble, selon la directrice du Centre de recherche en éducation et formation relatives à l’environnement et à l’écocitoyenneté, Lucie Sauvé. «Le fardeau de la preuve pèse maintenant sur les citoyens, qui doivent s’unir pour proposer l’alternative», expliquait-t-elle.

Interrogée sur la cohésion des luttes sociales par René Audet, le directeur de l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM, Mélissa Mollen-Dupuis, cofondatrice de la section québécoise du mouvement Idle no more, était catégorique sur l’intégration des luttes. «Il n’y a pas de droit, pas de langue, pas de territoire dans l’environnement», a-t-elle martelé. Elle a clos son allocution en soulignant que les Premières Nations devaient faire entendre leur voix puisqu’elles sont les premières victimes des changements climatiques. Observables rapidement dans leur quotidien lié directement à la nature, ces changements doivent être décriés.

Qui? Quand? Comment? L’écocitoyen redéfinit le système

«L’inaction est un choix moral» a lancé M. Mayrand, qui a comparé le refus de positionnement sur les présents enjeux à l’absence d’opposition des officiers nazis face au régime hitlérien. C’est un changement social profond qui devra être entamé si on ne veut pas causer des dégâts irréversibles. «Il est difficile de savoir comment commencer à prendre part à l’action collective, mais il faut agir sur ce qui est accessible», a ajouté Laure Waridel.

S’investir comme écocitoyen ne signifie pas se restreindre à un mode de vie strict et austère. «Je ne suis pas végane niveau cinq», a assuré Mme Mollen-Dupuis. Une brèche d’humour à laquelle a adhéré tout le panel qui souhaitait repousser la prétendue vision étroite des environnementalistes. «Personne ne veut consommer moins, car personne ne souhaite être moins», a pour sa part souligné Laure Waridel, en expliquant que l’on se définit désormais par rapport à notre consommation. À son avis, il faut donc amener la société à sortir de ce paradigme.

Le débat s’est enflammé autour de la critique du système actuel, qui a donné toute autorité à l’économie. «Celle-ci chapeaute désormais la sphère sociale et environnementale», a noté M. Mayrand. Mme Waridel a cependant affirmé que l’action est possible et peut provenir du bas. Les quatre participants ont alors cité en exemple le recul du projet de pipeline d’Énergie-est au Québec et l’abandon du projet de port pétrolier à Cacouna.

Les experts se sont au final fait prophètes d’un futur désolant et ont prôné une action forte dans un contexte d’urgence planétaire.

Photo : Pierre-Luc Daoust

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