Deviens l’artiste | Première québécoise de l’exposition do it à Montréal

L’exposition Do it Montréal évolue dans le temps par l’accumulation des participations et la remise en question de l’engagement social et politique de chacun. Confettis, bodysurfing, brillants pour les paupières, piscine de ballons blancs: une soirée haute en couleurs.

The Humming Room, 2012 par l’artiste Adrian Piper, est la première instruction présentée au public à la Galerie de l’UQAM. «Pour entrer dans cette salle, vous devez fredonner un air. N’importe lequel air conviendra. Commencez à fredonner lorsque vous approcherez de la surveillante.» Dès l’entrée, un sac de confettis est remis aux visiteurs.

Hans Ulrich Obrist, artiste suisse, commissaire d’exposition, critique et historien d’art est celui derrière ce projet qui fait le tour du monde depuis 1993. Organisée par l’organisme Independent Curators International (ICI), do it est de passage à Montréal du 13 janvier au 20 février 2016. Pour l’édition montréalaise, 43 oeuvres des 60 instructions sélectionnées et tirées du livre do it : the compendium (paru en 2013) sur une possibilité de 250, sont exposées au sein de l’institution. Dix d’entre elles ont été «commandées» à des artistes locaux.

Étudiante uqamienne à la maîtrise en histoire de l’art et commissaire déléguée de la Galerie de l’UQAM, Florence-Agathe Dubé-Moreau assure la sélection des oeuvres présentées et leur mise en espace. «Chaque détail constitue une décision. Le fait de placer ce bloc à cet endroit en était une», dit-elle. Aucune production ne suggère un exemple. Aucune création n’est statique.

Au programme : ambition et tentacules

Il s’agit d’un projet artistique dans lequel les oeuvres sont constamment réinventées et repensées. Ainsi, une même instruction est exécutée de différentes manières et chaque exposition est unique, assujettie au choix sélectif des commissaires, mais aussi des interprétations personnelles toutes distinctes les unes des autres. Cette présentation se veut un trajet à plusieurs directions dans laquelle les discours suggérés sont tout à fait subjectifs. À l’aide de divers supports et installations, les visiteurs deviennent les artistes exposés en réalisant les instructions. Plus d’une vingtaine de matériaux sont mis à disposition du public: crayons, panneaux en carton, ciseaux, ballons gonflables, échelles, craies et autres.

Déployée de manière hétérogène: à la Galerie de l’UQAM, sur le campus uqamien et sous forme «à emporter», do it Montréal rassemble «84 artistes, dont 24 québécois» qu’ils soient «chorégraphes, auteurs ou dramaturges». C’est donc dans un contexte montréalais et québécois qu’on trouve un total de 70 oeuvres, sans compter les interventions des 14 artistes invités à interpréter certaines instructions. «C’est vraiment un projet tentaculaire qui se voulait très fédérateur. On s’engage vraiment avec la communauté en étendant l’exposition hors des murs de la galerie», exprime Florence-Agathe Dubé-Moreau. Elle travaille sur la réalisation de cette exposition depuis juin 2015.

Une exposition métempirique

«Le do it c’est un jeu», souligne la professeure de muséologie et de théorie de l’art et directrice de la Galerie de l’Université du Québec à Montréal, Louise Déry. Les règles du jeu assurent que les formes des tâches proposées soient variées afin d’encourager la divergence entre les versions d’une même oeuvre.

Les performances qui ont parsemé la soirée illustrent le «projet infini dans le temps et libre dans son format», exprime la commissaire déléguée. Do it Montréal ne raconte pas une histoire linéaire. Elle offre plutôt une expérience qui permet une lecture aléatoire de l’exposition. C’est sous la direction de la chorégraphe Danièle Desnoyers que 12 étudiants du Département de danse de l’UQAM se sont mélangés à la foule pour se mettre à danser au déclenchement soudain du signal sonore. Leurs interventions artistiques, dont celles interprétées par Cristina Birri et Julie Villeneuve, deux étudiantes en 3e année, ont suscité des réactions de surprise chez les personnes les entourant. «Nous sommes un peu nerveuses puisqu’on ne veut pas envahir l’espace des gens. On se sent privilégié de faire partie d’un événement de cette envergure, d’un projet si atypique», confient-elles.

Avec cette exposition, Florence-Agathe Dubé-Moreau souhaite «amener le public à être conscient, critique et peut-être même rebelle» par rapport à la conceptualisation de l’art et à «réfléchir sur qu’est-ce qui définit une exposition, comment elle se construit et qui sont les gens derrière celle-ci». Ces instructions éveillent la remise en question, l’introspection et encouragent un questionnement sur la consommation de l’art, sur sa forme et sur soi.

C’est le temps d’y participer, vous aurez évité les confettis dans les cheveux de ce vernissage festif. Les oeuvres créées seront détruites par la galerie, une fois l’exposition terminée.

Photo : P. Côté

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