Le temps d’une soupe : un repas pour fraterniser

Sans-abris et citoyens ont fraternisé pour une rare fois jeudi soir lors de l’événement Le temps d’une soupe, une rencontre chaleureuse qui a surtout rappelé l’ampleur des défis à relever sur la question de l’itinérance.

Le concept avait de quoi plaire. Organisé conjointement par l’Action terroriste socialement acceptable (ATSA) et la Nuit des Sans-Abris (NSA), il s’agissait simplement de se rendre au parc Émilie-Gamelin et de déguster une soupe chaude. Tout ceci à la condition d’entamer une discussion avec un prochain.

À travers l’ambiance festive et musicale de l’événement, l’angoisse était pourtant palpable dans la plupart des conversations. «C’est un peu ironique qu’on se retrouve tous au Parc-Émilie Gamelin à chanter et danser quand la ville a chassé les itinérants du parc il y a deux ou trois ans», déclare Alexandre Paradis, ayant vécu lui même dans la rue entre 1998 et 2000. Le responsable de l’organisme S.O.S itinérance explique que plusieurs sans-abris se sont retranchés vers le square Viger depuis. «Et on veut encore les déplacer!, lance-t-il en référence à la fermeture du parc prévue le 8 novembre. Il faut absolument créer une mixité sans violence et jugement, on ne peut les ignorer plus longtemps».

Robert Brunet, soupe aux carottes à la main, est un peu plus optimiste, lui qui tente de faire sortir le vote chez les sans-abris. «Je travaille en ce moment pour Élection Canada, dit-il en pointant fièrement son chandail. Les politiciens ne parlent pas des problèmes de logements, mais si les gens concernés se mettent à voter, ça va changer». Celui-ci affirme ne pas avoir vu de candidat aux élections fédérales de Laurier Sainte-Marie visiter La maison du père, et en est un peu surpris. «Les sans-abris ne mordent pas, je trouve au contraire qu’ils ont des plus belles valeurs que le citoyen normal, comme la compassion et le partage», souligne-t-il.

Revendication

Cette année, les revendications de la NSA se concentrent principalement sur le retour de la Stratégie de partenariat de lutte à l’itinérance (SPLI), une subvention fédérale. «Sous le gouvernement Harper, la SPLI a pris un tournant très orienté vers le logement d’abord, ce qui est parfois bien, mais représente mal les besoins des plus démunis», explique Isabelle Renaud de l’Auberge du cœur le tournant. Un retour à une formule plus généraliste de la SPLI est demandé par le groupe. «Ces coupures affectent directement les travailleurs de rue, affirme-t-elle. C’est pourtant là que le plus gros du travail est fait». Pour Montréal seulement, il s’agit d’un manque à gagner de huit millions de dollars.

Pendant toute la soirée, les participants ont également eu droit à un chapiteau spécial de massage. Rencontré dans la file, Daniel, dans la rue depuis sa sortie de prison il y a deux ans, n’avait quant à lui pas le cœur à la politique. «J’aime ma femme, la soupe est bonne», lance-t-il avec entrain.

La Nuit des sans-abris aura lieu vendredi soir, 16 octobre, dans plus d’une trentaine de ville au Québec.

Photo : Alexis Boulianne

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