Tristesse objective

Lancé en pleine semaine de la prévention du suicide, le dernier roman de la canadienne Miriam Toews, Pauvres Petits Chagrins, est un livre autobiographique relatant l’histoire d’une sœur qui souffre de l’intérieur. Le septième roman de celle qui est connue pour Drôle de tendresse (2005) raconte ce qui arrive lorsqu’un proche est en quête d’une porte de sortie, tentant de fuir une détresse irrationnelle.

Récipiendaire du Rogers Writers’ Trust Fiction Prize, la version originale, traduite au Canada, se trouve d’une grande qualité. Riches en émotion, les descriptions sont d’une finesse enlevante. Bouleversante, la lecture fait mouiller les yeux.

Deux meilleures amies, deux confidentes, unies par les liens du sang : Yolandi et Elfrieda. Alors que la première est une écrivaine paumée, divorcée et mère de 2 enfants, la deuxième est une pianiste de renommée mondiale affectionnée par un mari aimant. C’est pourtant la seconde qui a le mal de vivre. Aux prises avec des troubles mentaux, elle mène une révolution secrète, traversant des tempêtes intimes. Suppliant sa sœur de l’emmener en Suisse, elle tente de se libérer du désespoir qui l’habite, car sa détresse est si grande qu’elle souhaite commettre l’irréparable.

Traitant d’un sujet très actuel, le livre parle du suicide assisté. Permis en Suisse, il est depuis quelque temps aussi légal au Canada pour les gens en fin de vie qui souhaitent mettre un terme à leurs jours dans la dignité. Il peut être envisagé par certains comme étant une solution idéale pour se délivrer de ses maux sans douleur et c’est exactement ce dont il est question dans le roman de Toews.
Pauvres Petits Chagrins, une référence au poème de Coleridge, est un livre portant sur la douleur psychologique qui pousse à la destruction, mais aussi sur l’entraide, le soutien et l’amour familial.

Livrée de manière sensible, c’est une histoire qui permet de bien comprendre les gens qui souffrent et se sentent impuissants. Elle réconforte ceux qui pourraient chercher à mettre un baume sur des blessures encore ouvertes ou à trouver des explications aux questionnements de ce phénomène.

Le sujet est délicat, voire troublant, telle que pourrait l’être la perte d’un proche aimé. Malgré les moments poignants, la narratrice garde une vision optimiste de cette situation. Le remède ne se trouve pas dans le déni, car «la douleur de renoncer au chagrin est aussi vive que le chagrin lui-même, voire plus.»*

*Citation du livre

 

Miriam TOEWS, Pauvres Petits Chagrins, Éditions Boréal, 384 pages.

 

 

 

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