Passé date

Afin de réduire le gaspillage, plusieurs personnes consomment volontairement des aliments périmés. Malgré leurs bonnes intentions, l’initiative comporte son lot de risques.

Une simple date cause la perte de centaine de kilos de produits alimentaires chaque année au Canada. Près de 27 milliards de dollars se retrouvent chaque année dans les sites d’enfouissement. Indignés face à un tel gaspillage, certains n’hésiteront pas à défier la date de péremption.

Étudiant à l’école de théâtre du cégep de Saint-Hyacinthe, Jules Bédard partage sa vision sans aucune gêne. «Quand j’étais à Montréal, j’ai pris l’habitude avec ne de mes amie d’aller fouiller dans les poubelles des petites épiceries locales», avoue le jeune de 20 ans. Outre les économies qu’il a pu réaliser sur la nourriture, cuisiner avec des aliments a forcé Jules Bédard à être créatif. Du même avis, Jade Brunelle, étudiante en enseignement du français langue seconde, mange de la nourriture périmée pour combattre le gaspillage. «Selon moi, jeter de la nourriture encore bonne ou pouvant être recyclée équivaut à jeter l’argent de ma mère à la poubelle», se défend la jeune femme.

Un produit qui dépasse sa date de péremption pourrait ne plus respecter les exigences réglementaires de Santé Canada «Au départ, la date de péremption s’agit de la période pendant laquelle le fabricant garantit la valeur nutritive déclarée, la stabilité et l’innocuité microbienne du produit si celui-ci n’est pas ouvert», explique une employée de l’Agence Canadienne d’inspection des aliments, Tammy Jarbeau. Conscients des risques que comportent leurs choix, les deux étudiants doivent faire attention à ce qu’ils mangent et ce qu’ils ne mangent pas. «Les seuls aliments que je ne mange pas lorsqu’ils sont périmés sont le pain, le lait et le fromage, confie Jade. Mon moyen pour savoir si je mange ou pas un aliment, même s’il y est indiqué qu’il est périmé, est de le regarder et de le sentir. Pas de moisissures, pas d’odeur nauséabonde? Je le mange.»

Carl Nolet, étudiant en chimie, au contraire, jette tous les aliments qui périment la date même, ou encore les jours précédents la date de péremption. «Je fais ça, parce qu’on ne peut pas voir les bactéries qui prolifèrent sur nos aliments, raconte-t-il. J’aime mieux ne pas prendre de chance et de les jeter avant que ça puisse me causer des problèmes de santé.» Pour la nutritionniste Marie-Hélène Bourbonnais, le «risque zéro» n’existe pas. Selon la spécialiste, la raison pour laquelle on met une date de péremption sur le produit, c’est pour éviter qui arrive des accidents avec des produits dans lesquels des bactéries se seraient développées durant une période de temps un petit peu plus longue. Lorsque les aliments sont périmés, la valeur nutritive des aliments peut également différer au niveau des gras, des vitamines et des minéraux. «Si c’est une personne âgée, une femme enceinte, ou un enfant qui mange un produit qu’on laisse un peu tomber la date de péremption et qu’ils sont malades, moi je ne trouve pas que ça vaut la peine», soutient Marie-Hélène Bourbonnais. Pour l’experte, dépasser la date de péremption d’une ou deux journées n’est pas synonyme de maladie, mais incite les gens à être vigilants.

 

La vie après l’épicerie

Dans les supermarchés, les règles de salubrité sont extrêmement strictes. Les marchands doivent s’assurer de la fraîcheur de leur produit et effectuer une rotation régulière des aliments. Gérant du Métro J.C. Messier de Laval, Maurice Papineau affirme que certains aliments périmés retournent aux compagnies. «Je n’ai par contre aucune idée de ce qui advient de cette nourriture par la suite», admet-il.

En 2013, une pétition avait circulé à l’Assemblée nationale, afin que le gouvernement oblige les épiceries à redistribuer la nourriture invendue aux banques alimentaires au lieu de jeter les aliments périmés qui seraient toujours comestibles. Alors que certaines compagnies alimentaires donnent déjà la nourriture aux banques alimentaires, d’autres restent de glace devant les demandes des citoyens. «Des produits comme ceux des marques Heinz et Campbell, par exemple, sont ramassés une fois par semaine et servent à approvisionner les banques alimentaires, assure Maurice Papineau. Tandis que d’autres produits, comme les marques maison, sont carrément jetés aux poubelles.»

Donner une seconde vie aux aliments en mangeant de la nourriture périmée peut être une façon d’éviter le gaspillage pour plusieurs personnes. La nutritionniste soutient cependant qu’il y a d’autres façons, moins dangereuses pour la santé avant de se tourner vers ce moyen. «Acheter en plus petite quantité, s’assurer d’avoir un bon roulement dans la cuisine, utiliser la congélation, ce sont des choses qu’on peut faire avant de manger des aliments périmés», affirme la spécialiste.

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