La TACEQ déconcertée

Le paysage politique étudiant pourrait être ébranlé dans les prochains mois. Une crise se dessine à la TACEQ et risque de mettre fin aux jours de la jeune organisation. 

Quatrième mousquetaire des associations étudiantes nationales, la Table de concertation étudiante du Québec (TACEQ) fait face à un mécontentement presque généralisé à l’interne. Incapable d’établir un consensus entre ses différents membres, l’association fondée en 2009 n’arrive pas à prendre position sur plusieurs enjeux majeurs. Trop souvent contraint à naviguer seul, le Regroupement des étudiants et étudiantes de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l’Université de Sherbrooke (REMDUS) a pris la décision de quitter l’organisation en janvier dernier. Les deux vice-présidents au secrétariat général de la TACEQ ont abandonné le gouvernail dans le dernier mois. Les autres associations membres considèrent désormais quitter le navire avant qu’il ne coule.

Le 23 janvier dernier, plus de 73% des membres du REMDUS ont voté en faveur d’une désaffiliation de la TACEQ à la suite d’une campagne référendaire. «On le considérait sérieusement depuis septembre, car on était la plus petite association membre et on arrivait mal à faire entendre notre voix», explique le secrétaire général du REMDUS, Jean-François Meslin. Bien que le regroupement sherbrookois ait été à l’origine de la création de l’association nationale, le modèle actuel était devenu «insoutenable» pour les membres du REMDUS. «C’est ultra-décentralisé, tout le monde va un peu dans sa direction et on avait un mal fou à trouver des consensus», soutient-il. Le REMDUS dit vouloir éviter de répéter les erreurs du passé et souhaite pour le moment conserver son indépendance. La TACEQ représente plus de 60 000 étudiants de la province, ce qui en fait la plus petite association nationale au Québec. L’Association des étudiantes et étudiants de Laval inscrits aux études supérieures (AELIES), l’Association étudiante de l’Université McGill (AEUM) et la Confédération des associations d’étudiants et étudiantes de l’Université Laval (CADEUL) sont les trois associations toujours à bord. Elles reconnaissent toutes l’existence des problèmes d’unité dans l’organisation. «C’est un problème majeur, ça rend notre représentation nationale très faible, car il n’y a pas de mandat clair», déplore Stéphane Lebrun, vice-président aux affaires externes de l’AELIES. L’organisation doit souvent se débrouiller sans l’appui de la TACEQ. «La grille de financement des universités est un sujet qui nous tenait beaucoup à cœur, mais on n’a pas pu faire consensus en assemblée, raconte-t-il. Donc, on a produit de façon indépendante un document en collaboration avec le REMDUS.»

Avec le départ de l’association sherbrookoise, l’AEUM doute désormais de la fonctionnalité de la TACEQ. «Maintenant, il ne reste que nous et l’Université Laval. Ça ne fait plus très national comme association», soutient le vice-président aux affaires externes de l’AEUM, Samuel Harris. Un congrès avait été annoncé à l’automne pour essayer de remettre la TACEQ à flot, mais l’absence d’ententes a encore mis des bâtons dans les roues des organisateurs. «Non seulement on ne pouvait pas se décider sur l’ordre du jour, on n’arrivait même pas à décider d’un endroit», se désole Jean- François Meslin. Le même constat est établi du côté de l’AELIES, qui comptait beaucoup sur ce congrès pour rétablir la situation. «Ça a créé du mécontentement chez les membres, on ne peut pas le nier», avoue Paul-Antoine Cardin. Des réflexions sont à faire, c’est certain que le statut quo ne serait pas souhaitable.»

Selon Jean-François Meslin, cette situation est due davantage à un problème d’image plutôt qu’à un manque d’implication dans les causes étudiantes. «On a vraiment été actifs en coulisses pendant le conflit de 2012 et particulièrement pendant le Sommet sur l’enseignement supérieur», assure-t-il. Ce point de vue est partagé par l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE), beaucoup plus visible durant la même période. «Nos relations avec la TACEQ étaient très bonnes, assure le porte-parole de l’ASSE, Justin Arcand. Nous avons collaboré avec eux sur plusieurs projets et actions pendant la grève.»

Ne me quitte pas

Le départ du REMDUS remet désormais la légitimité de la TACEQ en cause. «On ne veut pas détruire l’organisation par notre départ, mais on doute qu’elle puisse continuer dans les conditions actuelles», affirme Jean-François Meslin. La CADEUL partage cette inquiétude, mais croit que des discussions sérieuses devront être entreprises avant de tirer des conclusions. Le secrétaire général de la TACEQ croit que l’avenir de l’organisation passera par ses membres. «Nous sommes à leur service, on va se plier aux décisions prises», se contente d’affirmer Paul-Antoine Cardin, refusant de prendre position dans le débat.

L’AELIES tiendra un référendum au printemps, devançant le plan original d’un scrutin automnal. L’AEUM invitera également ses membres à se prononcer sur la question en mars. «Si McGill part, on pourra déjà dire que ce sera la fin, soutient le vice-président aux affaires externes de l’AELIES. La TACEQ ne serait plus présente que sur un campus et perdrait son statut d’association nationale et sa raison d’être.»

 

Photo: Flikr

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