Molière et Shakespeare

J’aime beaucoup Shakespeare et sa langue. «Thee», «Thou», «Thy», ça me sonne doux à l’oreille et me donne des flashback de Juliette sur un balcon. Mais voilà, mes talents en anglais restant limités et mon choix de programme d’étude m’a menée de fait dans une université francophone. J’apprends à faire le journalisme dans la langue de Molière et bien franchement, j’ai toujours préféré l’humour de ce dernier à celui de ce cher William.

Cette semaine, l’Université de Montréal s’est fait taper sur les doigts pour le fort penchant de certains de ses professeurs ou chargés de cours à fournir du matériel pédagogique en anglais. Selon ce que rapportait le quotidien Le Devoir, les travaux de ces enseignants pouvaient être remis en français ou en anglais, à la guise des étudiants. Une pratique qui n’est pas révoltante, mais sans aucun doute inquiétante. Surtout qu’elle semble répandue chez des étudiants de premier cycle qui plutôt que de tenter de réfléchir sur la matière qui leur est enseignée, doivent démêler les lectures obligatoires rédigées en anglais. La politique sur la langue de l’Université de Montréal semble rester bien floue quant aux exigences requises sur le français. Du côté de l’UQAM, c’est la politique 50 qui régit l’usage de la langue française, on y lit clairement que le français est encouragé. «L’Université préconise l’usage du français pour l’ensemble des activités académiques et du matériel pédagogique ainsi que pour tout support à ces activités», peut-on lire dans la description de la politique. Toutefois, un point soulève des questionnements. «L’Université reconnaît l’importance pour les étudiantes, étudiants de maîtriser d’autres langues et entend prendre des mesures pour encourager l’apprentissage ou le perfectionnement non seulement d’une deuxième, mais d’une troisième langue. À cet égard, des cours ou activités peuvent se dérouler dans une autre langue que le français pour les cas reconnus par la réglementation de l’Université.» Plaît-il? La réglementation en question semble plutôt floue et dans plusieurs facultés, l’usage de l’anglais est chose courante. L’École des sciences de la gestion, par exemple, propose régulièrement à ses étudiants des lectures en anglais. Une exigence normale, si l’on considère qu’il est difficile de s’adonner à une carrière en gestion sans parler l’anglais, mais d’obliger des étudiants qui ont fait le choix conscient d’une université francophone à suivre des cours en anglais ou à lire du matériel dans cette langue, pour moi ça n’a aucun sens. Surtout que plusieurs ne maîtrisent malheureusement pas encore l’anglais au niveau universitaire. Une lacune, sans doute, mais un fait accompli qui ne devrait pas se poser comme un obstacle à la réussite. L’Université de Montréal, l’UQAM et toutes ses collègues francophones devraient s’assurer de mettre des balises claires aux enseignants qui seraient tentés de transmettre leur savoir en anglais. C’est bien beau de speak in English, mais si on ne comprend pas ce qu’on dit ou ce qu’on lit, à quoi bon?

Sandrine Champigny
Rédactrice en chef
redacteur.campus@uqam.ca

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