Un code permanent et des signes de piastre

Le week-end dernier, mon statut de finissante au baccalauréat m’a rattrapée: je me suis mise d’un coup à penser à la maîtrise. Les inscriptions à l’hiver arrivant rapidement, plus le temps de niaiser, faut que je me décide. J’ai donc pris la chose au sérieux. Les fenêtres Safari se sont multipliées au même rythme que mes réflexions existentielles. Devrais-je choisir une université montréalaise? Je poursuis en communication ou j’explore un autre domaine? Est-ce que je ne devrais pas plutôt prendre une année sabbatique? Ah! Les grandes questions.

Il y en a une qui ne m’a toutefois pas effleuré l’esprit. «Penses-tu faire ta maîtrise à l’UQAM?», m’a demandé une amie à qui j’ai fait part de mes tergiversations. J’avoue qu’elle m’a pris de court. «Non, je ne pense pas», ai-je répondu, sans y avoir vraiment pensé. Je n’avais même pas considéré l’UQAM. Il faut dire que je ne suis pas de nature à rester au même endroit bien longtemps, préférant varier les établissements d’enseignement qui apparaissent sur mon CV. Reste que l’UQAM, dans mon esprit, n’est pas l’université la plus prestigieuse pour entreprendre une maîtrise. En quelle position étions-nous dans le palmarès mondial des universités l’année dernière? Bien bas, voilà où nous étions.

La semaine dernière, nous avons tout de même vécu un moment historique. La chargée de cours Elsa Acem est devenue la première doctorante en droit à l’UQAM. Aucune soutenance de thèse n’avait eu lieu dans ce domaine chez nous. Étonnant, dites-vous ? Pas vraiment. Ça ne prend pas un baccalauréat pour savoir que l’UQAM n’est pas réputée comme le choix numéro un en termes d’études juridiques sur l’île de Montréal. Ça n’a rien de méchant, ça ne veut pas dire que les cours n’y sont pas pertinents. Les universités ont leurs réputations et leurs spécialités, voilà tout.

Cashing!

En 2011, l’Université de Montréal a accueilli 11 366 étudiants de 2e et 3e cycle, alors que l’UQAM a compté 6 900 inscriptions à la maîtrise et au doctorat. Au baccalauréat, toutefois, les chiffres sont pratiquement les mêmes : 33 535 et 33 891 inscrits respectivement. L’UdeM a beau n’avoir au total que 4 000 étudiants supplémentaires, elle a reçu près du double des subventions gouvernementales dont a bénéficié l’UQAM l’année dernière. La raison se résume en cinq lettres: EEETP, ou effectif étudiant en équivalence au temps plein pondéré. De quossé? C’est la façon dont le gouvernement québécois calcule le financement des universités. Les institutions d’enseignement sont subventionnées en fonction du nombre d’étudiants qu’elles accueillent, mais tous les étudiants n’ont pas la même valeur. Un étudiant en médecine dentaire «vaut» beaucoup plus qu’un étudiant en administration, par exemple (voir texte Retards à maîtriser). L’UQAM, championne des sciences humaines et administratives, récolte donc bien peu au fil d’arrivée.

Les étudiants aux cycles supérieurs rapportent davantage aux universités que leurs collègues de premier cycle. La course aux subventions de recherche est largement dominée par la trinité que forment McGill, Laval et l’UdeM, qui amassent entre elles 76% du fonds de recherche de 1,46 milliards de dollars alloué aux universités par Québec, selon l’institut IRIS. C’est bien beau de plaider qu’il faut former les chercheurs de demain, mais, on va se le dire, la recherche est payante. Compter de nombreux étudiants à la maîtrise et au doctorat, c’est prestigieux, et ça représente beaucoup de fric. C’est quoi, quelques corrections de plus, pour les milliers de dollars supplémentaires que ça rapporte? Déjà qu’il n’y a pas suffisamment de profs, voilà que de moins en moins d’étudiants au doctorat souhaitent poursuivre une carrière de professeur à l’université. On ne s’en sortira pas.

Camille Carpentier

Chef de pupitre UQAM

uqam.campus@uqam.ca 

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