À la mauvaise place

Ils sont des milliers à faire leur entrée à l’UQAM cette année. Déjà, une idée germe dans la tête de nombre d’entre eux: changer de programme, voire carrément abandonner l’université.

Dans une classe de finissants en journalisme, près de la moitié des étudiants annoncent à tour de rôle qu’ils se tourneront plutôt vers les relations publiques une fois leur diplôme obtenu. Chacun d’eux fait pourtant partie des 60 % d’étudiants au premier cycle de l’UQAM qui termineront leurs études dans le programme qu’ils ont entamé. Les autres auront soit échoué ou choisi de «décrocher» de l’université.

À l’UQAM, une enquête effectuée par la direction de la recherche institutionnelle indique qu’une personne sur cinq abandonne ses études au baccalauréat. Selon France Landry, psychologue au soutien à l’apprentissage, les raisons pour lesquelles une personne quitte l’université sont multiples. En plus des contraintes financières et des problèmes académiques, certaines se rendent compte que le domaine qu’elles ont choisi ne leur convient pas. «Quand on se bat contre les échecs, qu’on est malheureux, il faut se demander si notre projet d’étude nous convient toujours», explique la psychologue.

De la proportion d’étudiants qui abandonnent le baccalauréat, 13 % s’inscrivent dans un programme différent au sein de la même université. «Il ne faut pas perdre de vue que des étudiants qui abandonnent leurs études à l’UQAM, certains poursuivront leur formation dans d’autres établissements scolaires», souligne Jenny Desrochers, porte-parole de l’UQAM.

De son côté, Sarah Savoie, orthopédagogue à l’UQAM, parle d’un deuil des études universitaires que certaines personnes doivent vivre. Elle se remémore une étudiante qui n’arrivait pas à s’épanouir à l’université et qui était entrée dans son bureau complètement bouleversée. «Aujourd’hui, elle fait un DEP et n’a jamais été aussi heureuse», raconte la spécialiste.

L’histoire de Frédérique Pelletier est semblable. L’an dernier, alors qu’elle était étudiante au baccalauréat en enseignement de l’éducation physique, elle a abandonné les études pour voyager. «Je ne me sentais pas à ma place sur les bancs d’école», explique-t-elle simplement.  Pour Sarah Savoie,  les méthodes d’apprentissage universitaires ne sont pas l’apanage de tous. «L’université, c’est très théorique», précise-t-elle. C’est aussi ce qu’a constaté Maude Garneau-Larose en débutant un baccalauréat en communication publique à l’Université Laval. «Je me suis aperçue que je suis quelqu’un qui doit apprendre avec des situations concrètes, voilà pourquoi je suis retournée au cégep pour faire une technique», raconte celle qui étudie aujourd’hui en gestion.

Plusieurs raisons poussent les gens vers les études supérieures, même si le profil universitaire ne leur colle pas tout à fait. Selon Sarah Savoie, il y a d’abord l’idée préconçue du parcours académique classique qui veut qu’après le secondaire, l’étudiant s’inscrive au cégep et passe ensuite à l’université. «Par contre, la génération actuelle présente aussi des cas d’étudiants qui sont les premiers de leur famille à aller à l’université. Pour eux, prendre la décision d’abandonner les études devient une question émotive», explique-t-elle. Pour d’autres, comme Frédérique Pelletier, ce sont les choix faits au cégep qui viennent les rattraper. «J’avais fait un programme général pré-universitaire au cégep. Je sentais donc que je me devais d’aller à l’université pour avoir un métier.»

La pression familiale n’est pas négligeable dans le parcours académique d’un étudiant. Pour Maude Garneau-Larose, c’est l’un des éléments principaux qui ont d’abord fait pencher la balance vers l’université. «Ça a été une grande déception pour mes proches lorsque j’ai quitté le baccalauréat. Disons qu’ils m’avaient fortement recommandé d’aller à l’université», raconte-t-elle.

Nouveaux et incertains

Selon une étude menée en 2011 par la Direction de la Recherche Institutionnelle de l’Université du Québec Seulement, 77 % des nouveaux étudiants de l’UQAM se disent certains de leur choix de programme. Par contre, sur 100 étudiants qui débutent une formation universitaire, dix effectuent un retour aux études et 13 ont déjà modifié leur trajectoire d’études.

À la maîtrise et au doctorat, les taux d’étudiants qui obtiennent leur diplôme tournent respectivement autour de 73 % et 48 %. Selon France Landry, il y a plus de décrochage durant la rédaction de thèse que durant les cours. La seule exception réside dans les programmes de science. Le laboratoire serait un port d’attache pour les étudiants. «Durant la rédaction de thèse, il y a moins d’encadrement pour les étudiants des autres programmes. Ils vivent beaucoup d’isolement et cela affecte leur réussite scolaire,» clarifie-t-elle.

Septembre tire à sa fin. Les couloirs de l’UQAM grouillent d’étudiants qui cherchent leurs locaux… et qui se cherchent un peu eux-mêmes.

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