«On s’en câlice de ton opinion!»

Quand j’étais étudiant à l’UQAM (79-82), j’étais le rédacteur en chef du Tracteur, le journal du module de communication. J’y faisais une chronique d’humeur, mode qui s’est malheureusement répandue dans les médias traditionnels par la suite. J’avais une belle plume et je croyais avoir un certain don pour le journalisme. Notre bouc émissaire était Lysiane Gagnon (déjà!) que j’avais baptisé «la sous-fifre de l’establishment» avant de changer pour «la présidente du club des fermières d’Outremont».

Fort de cette conviction juvénile envers mes remarquables capacités journalistiques, je me suis inscrit au cours de journalisme de Pierre Foglia, un dieu (déjà!) et j’ai cédé à la demande pressante de l’équipe nouvelle du Montréal Campus qui voulait me recruter. (Puisque mon lectorat au Tracteur avoisinait les 120 personnes, je me sentais king comme Réjean Tremblay.)

En peu de temps, Foglia et les affectations du Montréal Campus m’ont fait comprendre que je serais un très mauvais journaliste. Foglia m’a dit:
– Tu écris bien mais on s’en câlice de ton opinion, on veut des faits!

Je lui ai répondu:
– C’est ça que tu fais, toi, donner ton opinion !!!
– Oui, mais moi j’ai passé 20 ans à rapporter des faits. Ma chronique, je l’ai méritée.

Mon ami Marc Thibault, très impliqué à la rédaction au Montréal Campus, m’a fait comprendre la même chose, mais avec tant de gentillesse que j’ai eu peur de lui faire de la peine quand il m’a crissé dehors.

Depuis, j’ai développé un respect immense envers la profession de journaliste. Voilà pourquoi la lente agonie du Montréal Campus m’attriste tant car c’est ce journal qui m’a donné ma première chance… de me réorienter.

Guy A. Lepage
Animateur de l’émission Tout le monde en parle
Radio-Canada

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