La meilleure école de journalisme

Un café au lait à la main, Isabelle Hachey, rédactrice en chef de l’année 1996-1997, se rappelle les vieux téléphones noirs à fils, les collages de citations drôles et autres vestiges du local du Montréal Campus, où elle n’a pas mis les pieds depuis 15 ans. «On avait Internet sur un seul ordi dans la petite pièce qu’on appelait le backstore, dit-elle d’un air rieur. On était tellement fiers d’avoir Internet, on trouvait ça magique!» Ses «souvenirs inoubliables du Campus», où elle passait 80% de son temps, lui font dire que le journal étudiant a été plus qu’utile dans sa carrière. «C’est la meilleure école de journalisme que je n’aurais pas pu avoir!»

Comme beaucoup d’anciens du Montréal Campus, celle que l’on surnommait la dictatrice en chef — elle avait «peu de patience avec l’incompétence» — se désole de la mort annoncée de la version papier du journal. «Ce serait très dommage que le Campus disparaisse, dit-elle sur un fond d’amertume. Ça va vraiment créer une perte immense dans le bassin de jeunes journalistes talentueux, dans lequel puisent les organes de presse.» Elle étaye que le «grand boss de la salle de rédac» de La Presse Éric Trottier, lui-même ex-campussien, reconnaît le professionnalisme et la débrouillardise des vétérans passés par l’expérience du bimensuel uqamien. «Il n’y a pas de meilleure façon d’apprendre à faire du journalisme en équipe et de vivre avec les conséquences de nos publications.»

«Très franchement, je n’allais pas beaucoup à mes cours, confie l’ex-rédactrice en chef, alors étudiante au baccalauréat en science politique. Je me souviens d’une fois où je suis entrée dans ma classe et où les bureaux étaient en cercle.» Les étudiants discutaient à tour de rôle d’un livre qu’elle n’avait même pas lu. N’ayant aucune idée de ce dont ils parlaient, elle a quitté le cours son tour de parole venu. «Et je n’ai jamais terminé mon baccalauréat», dit-elle en ricanant.

Ce trou dans son dossier n’aura pas empêché la journaliste d’être recrutée par La Presse. En 2000, Isabelle Hachey est nommée correspondante à Londres, ville à partir de laquelle il était facile de se déplacer au Moyen-Orient, «à l’époque de la guerre au terrorisme qui a suivi les attentats du 11 septembre 2001 à New York».

Bien qu’elle ait eu le privilège d’une carrière à l’international, Isabelle Hachey n’a pas laissé derrière elle ses amis du Montréal Campus pour autant. «Je fréquente très régulièrement François Desjardins, Charles Grandmont, Judith Lachapelle, Alexandre Sirois et Claudine St-Germain, se réjouit-elle. Même nos enfants sont amis!»