Reconnaissance et hypocrisie

«La folie est le plus vif de nos dangers, et notre vérité peut-être la plus proche», dixit Michel Foucault.

Malgré les 400 ans qui séparent la première représentation de L’Histoire du Roi Lear de Shakespeare à celle de la compagnie de création Ubu, l’essence du message reste intemporelle. Le puissant roi de France, à travers sa quête d’amour et de reconnaissance, est détruit à petit feu par l’hypocrisie et l’opportunisme de ses filles et en perd tous ses repères identitaires.

Rendu à l’âge de léguer son héritage à ses filles, le roi Lear établit les récompenses en fonction de leur amour. Les deux aînées, perfides et ambitieuses, flatteront leur père par leurs mensonges, tandis que la cadette, trop franche, se verra chassée à cause de son honnêteté. Un complot est monté contre lui et il se rend compte bien assez vite de la futilité de son pouvoir, lorsqu’il se fait abandonner par ses héritières. En parallèle, le comte de Gloucester, dupé par Edmond, son fils sournois, devient plus acerbe envers son second fils, Edgar, qui n’a d’autre alternative que de se retirer en forêt. Ces deux hommes puissants, bernés par leur progéniture, prendront conscience de l’absurdité de leur condition et la vacuité de leur statut, et finiront par en périr.

S’inspirant d’une vieille légende galloise, cette tragédie classique, visualisée par un des plus grands écrivains anglais de la Renaissance, affirme sa modernité à travers la direction artistique de Denis Marleau, qui intègre de nouvelles technologies dans sa mise en scène. Les pulsions sexuelles entre les personnages ressortent fortement à plusieurs reprises et nous font réfléchir sur le penchant malsain de nos désirs les plus profonds. L’artiste visuel, Guillaume Lachapelle, joue avec les rapports à l’espace et utilise presque exclusivement des projections visuelles, très réussies, comme élément de décor, tentant ainsi de permuter le non-lieu.

L’Histoire du Roi Lear brille par son métissage avec ses éléments contemporains. Malgré quelques longueurs, le jeu des acteurs captive, particulièrement celui de Gilles Renaud dans le rôle du Roi Lear, tout au long des 2 heures que dure la représentation.

L’Histoire du Roi Lear, mise en scène par Denis Marleau, présenté au TNM du 13 mars au 7 avril 2012.

Courtoisie: Yves Renaud

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