De l’autre côté de l’enclos

Diffi cile de prévoir la voie qu’allait emprunter Denis Côté après le succès de Curling, fi lm qui se voulait relativement grand public comparativement à ce à quoi il nous avait habitué jusqu’alors. De toute évidence, il a choisi pour son sixième long-métrage de ne pas répéter l’expérience. Film essai ou fi lm expérimental, Bestiaire est certainement très loin du documentaire traditionnel. Présentée en ouverture des derniers Rendez-vous du cinéma québécois, cette oeuvre se veut un retour à son cinéma à la forme plus audacieuse.

Dépourvu de toute trame narrative, Bestiaire est avant tout un regard passif sur la vie d’animaux de zoo, une fois la saison estivale terminée. Tel un peintre animalier, Côté capture le plus naturellement possible leur quotidien monotone. D’une scène à l’autre, une certaine intensité se construit à travers le vacarme des cages et les coups de sabots qui nous rappellent la captivité des animaux. S’en suit une deuxième partie plus courte, au cours de laquelle un taxidermiste s’affère à l’empaillage d’un oiseau. Toujours sans intervention, le réalisateur choisit d’étudier minutieusement le travail de l’homme. Le fi lmse conclut avec le retour de l’été, et du même coup celui des visiteurs se rendant au zoo.

Filmée par une caméra fi xe et frontale, l’image devient comme la vitrine d’un enclos et le spectateur se retrouve malgré lui en position de voyeur, d’intrus dans la vie privé de ces bêtes. Le horschamps s’impose et du même coup une grande importance donnée à la conception sonore qui donne au film son côté par moment étouffant. Aucun dialogue, aucune musique, seulement le son ambiant de ces scè-nes marquées par la lenteur, ponctuées de silence.

Un fi lm de contemplation et d’observation, l’homme devant la bête, la bête devant l’homme, au cours duquel on fi nit par se demander qui est le plus «animal» des deux. Loin de s’adonner à un quelconque discours de défense des animaux, Côté propose avec Bestiaire un fi lm ouvert, qui porte à une réflexion profonde, sans jamais imposer un point de vue précis.

Bestiaire, de Denis Côté, Québec, 72 min.
À l’affi che le 6 avril.

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