La pub sur le podium

Persona non grata sur le campus, la publicité ne se taille une place qu’au sein du Centre sportif et dans les toilettes de l’UQAM, où elle aide à financer les bourses des étudiants.

C’est l’aurore. Un étudiant en communication à l’UQAM, se rend au Centre sportif afin de faire son entrainement matinal. Assis dans le métro, il analyse une publicité placardée devant lui. La pub est omniprésente dans l’univers métropolitain. Sur les abribus, dans le transport en commun, sur les panneaux aux abords des autoroutes et même sur les bixis. L’Université figure, à ce jour, comme le seul village gaulois qui résiste à l’envahisseur. Et pourtant… En sillonnant les couloirs du Centre sportif de l’UQAM, l’étudiant est exposé aux multiples publicités qui colonisent les murs du bâtiment.

Le comité à la vie étudiante a enjoint il y a quelques années le Centre sportif de trouver des solutions pour s’autofinancer. «L’Université doit être inventive pour offrir des services de qualité, avance Alain Giasson, agent d’information au Centre sportif de l’UQAM. La publicité est un des moyens qu’on a privilégié.» L’affichage de publicité interdit à l’intérieur de l’Université, le Centre sportif a dû obtenir une autorisation de la part de l’institution. «Étant donné qu’il s’agit d’un lieu de service et non un lieu d’enseignement et de recherche, la direction a obtempéré à la demande», explique la directrice de la promotion institutionnelle à l’UQAM, Nathalie Benoit.

Les revenus amassés par la publicité dans le Centre sportif sont entièrement redistribués en bourse aux étudiants athlètes. «L’Université n’est pas riche et nos étudiants sont souvent les premiers de leur famille à aller à l’Université, explique Alain Giasson. Les publicités nous permettent de leur offrir de l’aide». Bon an mal an, c’est entre 30 000 $ et 40 000 $ qui sont remis en aide financière aux athlètes uqamiens. À l’extérieur des installations sportives de l’Université, la publicité est prohibée, enfin presque. Dans les années 90, l’UQAM a retenu le réseau Zoom média comme seul afficheur de publicité à l’intérieur de son enceinte. Cette entreprise gère les publicités qui se retrouvent dans les cabinets de toilette du campus. «L’institution se fait régulièrement approcher par des compagnies qui souhaitent afficher ici, mais elle a toujours refusé», note Nathalie Benoit. Les redevances versées à l’UQAM par Zoom média sont également remises en bourses pour les étudiants à la maîtrise et au doctorat. Depuis l’instauration du réseau, c’est 43 000 $ de plus par année en bourse qui est remis via la fondation de l’UQAM aux étudiants des cycles supérieurs.

Même si les revenus sont redistribués aux étudiants, les entreprises ne doivent pas financer les activités universitaires selon Françoise David, porte-parole de Québec solidaire. «Si les compagnies veulent être généreuses et donner des bourses, qu’elles le fassent directement aux universités, mais pas par l’entremise de publicités», tranche-t-elle sèchement. Si sa formation politique tient une position nuancée sur la publicité dans les institutions publiques, elle croit tout de même qu’il faut tout mettre en œuvre pour la minimiser. «C’est un endroit où les gens vont travailler, clame sans hésitation Françoise David. Les gens ont choisi d’aller là, ils n’ont pas choisi de se faire bombarder de publicités.»

Pour les dirigeants du Centre sportif de l’UQAM, il n’y a pas lieu de créer un débat autour de la pub. «Notre clientèle est universitaire, elle sait différencier le bon du charrié», élabore Alain Giasson. Il ajoute que l’UQAM n’a aucune règle sur les compagnies qui peuvent afficher ou non à l’intérieur des installations sportives. «Ce sont les règles de bon goût qui s’appliquent, atteste l’agent d’information du Centre sportif. Nous ne sommes pas là pour faire des débats politiques». Ça fait plus d’une décennie que la publicité est présente dans le centre d’entraînement uqamien et les plaintes sont rarissimes. Pour les étudiants, la publicité fait partie du décor. Alain Giasson souligne que la publicité ne se retrouve pas dans une salle de classe, mais bien dans un endroit qui offre un service.

À bout de souffle à la sortie du gymnase, une étudiante qui passe par là lorgne une publicité de parfum mettant en vedette Jessica Simpson et tranche: «Si ça peut aider les athlètes de l’UQAM, je ne vois pas d’inconvénient à ce qu’il y ait de la publicité ici.»

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Même son de cloche sur la montagne
À l’instar de sa voisine du centre-ville, l’Université de Montréal ne tolère la publicité que dans son centre sportif. L’argent amassé fait partie du budget d’opération du Centre sportif de l’Université de Montréal (CEPSUM). «L’impact de la publicité est probablement plus grand chez nous parce que le public a accès à nos installations contrairement à l’UQAM», note Benoit Mongeon coordonnateur communication et marketing au CEPSUM.

Crédit photo: Étienne Dupuis

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