Les dessous de la grève

Espérée ou honnie, la grève suscite de nombreuses interrogations. Montréal Campus propose un guide pour mieux comprendre ses rouages.

Quorum de grève
Chaque association facultaire de l’UQAM tient une assemblée générale de GGI, qui constitue un «arrêt volontaire et collectif des activités normales d’apprentissage». Le nombre de membres nécessaire pour avoir quorum lors d’un vote de grève varie d’une association à l’autre.


Droits des contestataires
Les décisions des assemblées générales de chaque association indiquent si les étudiants sont tenus ou non d’aller à leurs cours, mais un flou juridique perdure autour du droit de grève des étudiants. N’ayant pas le même rapport de force que les travailleurs, soutenus par le Code du travail, la grève en droit du travail ne s’applique pas à ceux qui étudient. D’autre part, la Loi sur l’accréditation et le financement des associations d’élèves et d’étudiants prévoit qu’une association a comme fonction principale de «représenter respectivement les élèves ou étudiants […] et de promouvoir leurs intérêts». La décision des associations peut toutefois être reconnue comme légale si amenée en cour. Selon Jean-Pierre Villagi, professeur et chercheur au Département des sciences juridiques de l’UQAM, ce sont les conséquences de la grève qui pourraient avoir des effets illégaux. Si l’Université juge que l’accès aux services universitaires n’est pas garanti, elle pourrait présenter une demande d’injonction. Ce sera alors au tribunal de trancher.

Certains étudiants remettent en question la légitimité des décisions de grève. Parmi eux, le Regroupement des étudiants pour le respect de la liberté individuelle de choix (RER-LIC), un groupe uqamien aux administrateurs anonymes qui incite les étudiants à assister à leurs cours malgré les débrayages. Le groupe affirme «qu’aucune loi ne permet aux associations étudiantes de faire la grève» ou de l’imposer. Sur leur blogue, les fondateurs n’obligent pas les étudiants à prendre position sur la hausse des frais de scolarité, mais plutôt à continuer à aller en classe, malgré le piquetage ou les tournées de classe. Le groupe irait même jusqu’à défendre les élèves ayant voté contre la GGI en justice afin de démontrer que la décision était anticonstitutionnelle. Le RER-LIC n’a pas répondu aux courriels du Montréal Campus.


Droits et obligations des professeurs
L’article 27.04 de la convention collective du Syndicat des professeurs et professeures de l’Université du Québec à Montréal (SPUQ) indique qu’un professeur «a le droit de refuser d’exécuter un travail si […] ce travail l’expose à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique». «La convention collective nous livre une prestation de travail dans la mesure où les conditions sont réunies, explique Jean-Marie Lafortune, troisième vice-président du SPUQ. Tous les jours, nous devons nous rendre aux salles de classe pour constater la situation, mais les professeurs ne sont pas tenus de travailler s’il y a du piquetage ou des manifestations violentes.»

Selon la quantité d’étudiants qui se rendent aux cours, les professeurs peuvent avancer dans la matière donnée ou approfondir certains textes, par exemple. Les professeurs qui ne tentent pas d’aller en classe, toutefois, pourraient avoir un avis à caractère professionnel déposé dans leur dossier et être convoqué par le Service du personnel enseignant de l’UQAM pour faire le point sur leur comportement.

Position de l’UQAM
Même si la position officielle de l’Université reconnaît le droit des étudiants au boycottage de leurs cours, elle estime que l’ensemble des activités et des cours est maintenu. Les étudiants qui veulent suivre leurs cours peuvent donc le faire. Dans le cas d’intimidation ou d’entrave à la circulation entre les murs de l’UQAM, la direction invite à signaler la situation au Service de la prévention et de la sécurité, poste 3131.

En février 2008, lorsque l’AFESH avait voté une GGI, l’Université du peuple avait exhorté l’association de ne pas «perturber» la vie académique et de ne pas «nuire aux étudiants désireux de poursuivre leurs études». Elle avait indiqué qu’une grève illimitée nuirait à l’image et entraînerait une baisse d’inscriptions l’année suivante.

Pour le moment, les responsables n’osent pas s’avancer quant aux mesures qui seront prises dans le cas d’une GGI la session prochaine. «L’Université prendra, en 2012, les décisions qu’elle jugera nécessaires dans l’intérêt des membres de la communauté universitaire si les circonstances l’y obligent», avertit Jennifer Desrochers, conseillère des relations de presse de l’Université.

Les concessions
Les étudiants du cégep sont tenus d’avoir un minimum de 82 jours de cours par session. Les universitaires, eux, n’ont pas les mêmes contraintes, chaque université étant responsable du temps de cours. Lors de la GGI de 2005, la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) a négocié une entente avec le gouvernement et les étudiants de l’UQAM avaient été en classe jusqu’à la première semaine de mai, empiétant un peu sur la session d’été. Le ministère de l’Éducation a confirmé qu’une GGI n’a jamais entraîné l’annulation d’une session au Québec.

Crédit photo: Philippe Némeh

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