Prendre la balle au bond

Malgré plusieurs initiatives, l’UQAM peine à établir une culture sportive à l’intérieur de son enceinte et l’aide financière attribuée à ses athlètes est lacunaire. L’alma mater du centre-ville devra se ressaisir, sans quoi la compétitivité de ses équipes pourrait en prendre pour son rhume.

En baguenaudant sur le campus de l’Université de Montréal, il est fréquent d’apercevoir des gens arborer des vêtements à l’effigie des Carabins. Idem sur la montagne de l’Université McGill, où les partisans n’hésitent pas à exhiber leur allégeance envers leur équipe sportive en endossant le dossard rouge des Redmen. Réalité diamétralement opposée à celle de l’UQAM où les chandails des Citadins sont rarissimes. Si les autres universités semblent avoir saisi l’importance du sport d’excellence, l’Université du peuple, elle, peine à établir une culture sportive dans son établissement.

Les investissements de l’institution dans le programme de sports d’excellence sont très modestes en comparaison aux autres universités de la province. «Le sport est un véhicule de communication et de promotion au pouvoir inouï, soutient Daniel Méthot, coordonnateur du sport d’excellence de l’UQAM. Il va falloir se secouer les puces un jour et se dire qu’il faut investir dans le programme sportif.» Pour celui qui a étudié dans une institution anglo-saxonne où la tradition du sport universitaire est omniprésente, il en va de la compétitivité du programme des Citadins, mais aussi de la renommée de l’institution universitaire au complet. «Nous sommes dans la course tous les jours au niveau sportif, mais est-ce que l’UQAM est dans le coup pour recruter les étudiants? Est-ce que l’UQAM est dans la course pour être la meilleure université au Canada?»

À l’Université de Montréal, on croit aux bienfaits d’un programme sportif en bonne santé. Pour Jean-Pierre Chancy, coordonnateur du sport d’excellence de l’institution, le programme sportif des Carabins doit être à l’image de tous les services offerts par l’Université. «Une institution qui se veut de haut échelon se doit d’offrir le meilleur», dit-il avec orgueil. À l’Université McGill le sport d’excellence est également considéré comme une partie intégrante de l’éducation. «Nous mettons en place un programme sportif centré sur l’apprentissage à travers l’entraînement, le service à la communauté et l’engagement communautaire», explique Earl Zuckerman, directeur des communications du programme sportif de l’université anglophone.

Qui plus est, les clubs sportifs universitaires offrent une vitrine sans égal pour l’institution qu’ils représentent, selon Jean-Pierre Chancy. Avec leur équipe de football, les Carabins font régulièrement les manchettes dans les plus grands médias de la Belle Province. «Ce n’est absolument pas notre cas en ce moment, déplore Daniel Méthot. Mais les gens commencent à comprendre la valeur d’une présence dans les pages de journaux.»

La bourse ou la vie
Si elle désire compter dans ses rangs plusieurs champions, l’institution devra s’assurer de mieux soutenir ses athlètes sur le plan financier. La rachitique enveloppe de bourses prodiguées aux étudiants athlètes par l’Université fait souvent obstacle à un recrutement de qualité. L’UQAM dispose à l’heure actuelle d’un budget variant entre 40 000 $ et 50 000 $ par an en bourses offertes à quelques-uns de ses 165 athlètes. «C’est nettement insuffisant pour demeurer dans la course», selon le grand manitou des Citadins, en comparant avec ce qui se fait ailleurs dans la métropole. L’Université de Montréal appâte ses athlètes avec une enveloppe de bourse de 280 000 $ pour 400 athlètes. Quant à l’Université McGill, elle bénéficie d’un budget avoisinant les 220 000 $ pour 580 athlètes. «À long terme, si on ne rattrape pas notre retard par rapport aux autres universités, on va toujours attirer les étudiants athlètes de deuxième ordre», déclare la tête dirigeante du sport d’excellence uqamien.

Lorsque vient le temps de choisir une institution universitaire où poursuivre ses études, l’étudiant athlète n’a souvent d’autre choix que de favoriser l’aspect financier. «Il arrive qu’on offre une qualité d’enseignement équivalente à celle d’une autre institution, mais que celle-ci nous supplante financièrement», admet Daniel Méthot. Pour la joueuse de basketball Camille Michaud, étudiante au baccalauréat en psychologie, il ne fait aucun doute que les chétives bourses attribuées par l’UQAM ne sont pas adéquates. «Ils font de leur mieux pour nous aider, mais il faut travailler très fort l’été par nous-mêmes pour payer nos études», affirme l’expérimentée joueuse de basket. Même son de cloche chez sa coéquipière Catherine Bougie, qui complète un baccalauréat en urbanisme. «On met un nombre d’heures considérable dans le basket et on ne peut pas avoir d’emplois. Avec les études, c’est très difficile à gérer.» Une augmentation de l’aide financière est donc une condition sine qua non à la performance de l’organisation sportive dans les prochaines années.

Maintes mesures ont déjà été mises en place par l’UQAM pour atteindre son objectif d’offrir 100 000 $ de bourses d’ici trois ans et ainsi, doubler ses dons. «Dans le sport, on doit faire preuve d’originalité et faire avec le moyen du bord», lance, sourire en coin, celui qui dirige les Citadins depuis bientôt trois ans. Le comité de Citadins représentés par des étudiants multiplie les campagnes de financement, comme l’organisation de la coupe UQAM, qui permettent d’offrir des bourses à plusieurs étudiants athlètes.

L’organisation citadine réussit également à allouer une dizaine de bourses grâce aux partenaires du Centre sportif qui, par l’entremise de la Fondation UQAM, distribue 20 000 $ en aide financière. En 1997, la quête de commanditaires était au cœur des préoccupations de l’équipe. Quatorze ans plus tard, les partenaires financiers du sport d’excellence uqamien ne sont toujours pas légion. L’organisation mise sur le programme Adopter un Citadin, qui vise à impliquer les entreprises dans le financement du sport d’élite. Seule partenaire de l’initiative pour l’instant, la Coop UQAM octroie des bourses qui paient les frais de scolarité de deux étudiants athlètes. «Plusieurs perches sont lancées pour développer de nouveaux partenariats. On tente d’attirer des entreprises comme la Banque Nationale en leur disant que nos athlètes constituent pour eux une relève formée de choix», indique Daniel Méthot. La route s’annonce ardue pour l’UQAM qui devra trouver le moyen d’attiser la passion de ses étudiants si elle veut qu’un jour les uniformes bleus des Citadins envahissent ses couloirs bruns.

Crédit photo: Grégory Hallé Petiot

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