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La danse indienne gagne en popularité à Montréal

Mise au goût du jour par le film Slumdog Millionaire, la danse indienne trouve de plus en plus d’adeptes à Montréal. Pendant que l’hiver reste au vestiaire, les cultures se mélangent aux rythmes d’une Inde chaleureuse et spirituelle.

Photo: Jean-François Hamelin

Les tambours résonnent. Puis la voix s’ajoute, le rythme s’accélère. Les hanches des trente femmes s’ébranlent pendant que leurs bras relevés tendent à s’affaisser vers le sol. La professeure de Bollywood Banghra du YMCA centre-ville, Assya, est penchée sur son iPod et s’adresse à la classe. «La prochaine chanson sera la pièce Jai Ho, du film Slumdog Millionaire. Peut-être la connaissez-vous…» Échange de regards. La grande majorité des participantes sont là pour la première fois, par simple curiosité, ou parce qu’elles avaient hésité «entre la capoeira et la danse indienne». Si tous s’entendent pour dire qu’elle est un important véhicule de la culture indienne, c’est bien plus qu’un simple pas qui sépare la danse classique indienne et la danse inspirée des films de Bollywood.

Imprégnée de la culture de l’Inde depuis plus de vingt ans, Ginette Dion-Ahmed va droit au but. «Je trouve que la danse Bollywood est bien exécutée seulement par des Indiens et que ça leur appartient. Ils ont une façon de bouger différente qui leur est propre.» De nombreux voyages au pays de Krishna et une expérience de longue date en danse indienne ont mené Ginette Dion-Ahmed à enseigner le bharatanatyam. Celle-ci est une des plus anciennes danses de l’Inde, qui s’apparente au ballet classique en matière d’apprentissage et de difficultés. «Les gens sont plus attirés par le Bollywood, par la danse fusion, parce qu’ils veulent que ce soit rapide à apprendre.» La danse inspirée des scènes chorégraphiées des films de Bollywood est un mélange de danse folklorique et classique indienne, avec des rythmes parfois latin, parfois arabiques, et même du hip-hop. La musique utilisée pour cette danse peut être surprenante, comme a pu le constater le Montréal Campus, alors que dans les locaux du YMCA retentissait la voix de Wyclef Jean, superposée à celle d’un chanteur indien.

Danse hybride

Il n’y a pas qu’à Montréal que la danse Bollywood fait sauter et tourner, les poignets tournés vers le sol, l’index pressant le pouce. Au Saguenay-Lac-Saint-Jean, Samuel Lepage a troqué Québec Issime contre la danse orientale. Inspiré par ses trouvailles sur Youtube, l’interprète en danse a fait la conception entière d’un numéro de Bollywood pour le Cégep en spectacle de Chicoutimi. «J’ai regardé des vidéos de professeurs pour savoir ce que j’exprimais avec les mouvements.»

Même si la danse indienne classique nécessite un long apprentissage et une profonde maîtrise technique, Ginette Dion-Ahmed croit qu’il est possible d’actualiser la danse indienne par le biais de la création. «Les mouvements de base sont comme un langage. Les possibilités sont infinies. On peut même y insérer un poème québécois… C’est un moyen de mélanger les cultures.» Le bharatanatyam met l’accent sur les mouvements de mains, de pieds, mais aussi sur les expressions des yeux et du visage, à la manière d’une actrice. Dernièrement, Ginette Dion-Ahmed a monté le conte russe L’Oiseau de feu en bharatanatyam, repoussant les limites du métissage.

Lumineuse Inde

Lorsqu’elle est questionnée sur Slumdog Millionaire et autres numéros de danse Bollywood à So you think you can dance, l’artiste Caroline Tabah éclate de rire. «Ils ont contribué à hausser l’intérêt de la danse indienne, mais n’en sont pas à l’origine», précise-t-elle. À son avis, l’engouement est de plus en plus marqué à Montréal pour l’art indien depuis 2005. Elle explique que le caractère unique de la danse fascine et suscite l’intérêt. «Il y a une forme de célébration de la vie et de cet état d’être humain que l’on ne retrouve pas dans d’autres danses, un aspect lumineux et festif qui rejoint les gens. Ça correspond à ce besoin d’un espace spirituel qui ne soit pas rattaché à un dieu, comme le yoga.» La spiritualité qui vient avec la pratique de la danse classique indienne a su rejoindre cette Québécoise pourtant née bien loin du Gange. La poésie, la beauté des mouvements et les émotions font qu’elle considère la danse comme un tout. «Au début de chaque séance de danse, il y a des salutations. On demande la permission à la Terre de la frapper de nos pieds…»

Si pour Caroline Tabah la danse se présente davantage comme un antidote à la morosité quotidienne, Amrita Choudhury y voit plutôt une thérapie. Malgré son français un peu cassé, celle qui enseigne la danse depuis 27 ans s’emballe. «On sourit tout le temps! C’est une danse très émotionnelle, qui touche à tous les points d’acupuncture. Elle sculpte votre corps de l’intérieur et de l’extérieur.»

Les mudras, ces mouvements précis des mains qui constituent autant de symboles, autant de mots d’un même vocabulaire, sont capitaux dans la plupart des danses indiennes. Ils portent la signification de l’histoire racontée, souvent celle d’une divinité. Et peu importe d’où l’on vient, on comprend ce qui est exprimé, constate Amrita Choudhury. «Parce que le cœur est le même partout.»

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